Maîtres anciens

de Thomas Bernhard (1931-1989)

Éditions Folio (1999)
Roman, 254 pages

La couverture dans cette collection annonce très bien la couleur puisqu'on y voit une de ces merveilleuses marionnettes du peintre Paul Klee, intitulée « Clown aux larges oreilles ». Par contre la traduction littérale du titre de ce roman de l'écrivain autrichien Thomas Bernhard est « Maîtres anciens Comédie » ce qui convient à l'illustration en couverture et au contenu de l'œuvre. Toute comédie profonde comme celles de Molière n'est qu'une façon particulière d'aborder des histoires tragiques. A cet égard le héros moderne de » Maîtres anciens Comédie « peut faire songer au « Misanthrope » de Molière, dans sa fureur contre les hypocrisies sociales et sa recherche éperdue et désespérée d'authenticité.

Nous sommes à Vienne en 1985. Le héros de ce roman, Reger est un vieillard qui rédige pour le « Times » des articles sur les événements culturels viennois. Depuis de nombreuses années, Reger se rend au Musée d'art ancien, dans la salle où se trouve un tableau de Tintoret, L'homme à la barbe blanche. Grâce à la complicité d'un gardien, Irrsigler, la banquette qui se trouve face à ce tableau lui est personnellement réservée. A partir de là, le lecteur va entendre ce que pense Reger assis sur sa banquette, un de ses amis relatant ses réflexions. Dire que Reger est pessimiste, le mot est faible. Il est comme porté par la force de son indignation. Tout ce qu'il peut y avoir de respectable ou de sacré en Autriche est mis en pièces par Reger. Il passe à la paille de fer les poncifs culturels et les conventions sociales, sans épargner aucun milieu social. Il ressasse un thème pour enfoncer le clou, il piétine pour repartir de plus belle vers un autre sujet. Son amour pour sa femme décédée arrive soudain, en contrepoint lumineux.

Thème, variations, leitmotiv : Thomas Bernhard agence ces vitupérations comme s'il composait une œuvre musicale. Un déluge de considérations féroces sur une foule de sujets. Cela réjouit, choque ou émeut le lecteur. Impossible de rester indifférent.

Le 14 mars 2001

Samuel Holder

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