C'est l'histoire d'une double enquête originale, sans
flics et sans flaque de sang. Elle concerne à la fois des secrets de famille et
les secrets d'un homme atteint par la maladie d'Alzheimer. Tout se passe au
cur ou autour d'une famille de la haute bourgeoisie suisse. Les entreprises
Koch n'ont cessé de prospérer et de se diversifier depuis des
décennies jusqu'à nos jours, sans anicroches. La Seconde guerre
mondiale n'a fait qu'offrir des opportunités supplémentaires. La
famille Koch doit sa réussite éclatante avant tout à sa doyenne,
Elvira, qui a toujours suivi la marche des affaires du groupe avec une vigilance sans
faille. A l'âge de quatre-vingts ans, elle veut bien faire mine de
s'effacer, sans décrocher pour autant.
Mais le personnage central autour duquel se construit toute l'intrigue est Conrad
Lang, soixante-ans, « le fils naturel d'une employée de maison des
Koch ». Il a été pendant longtemps le compagnon de jeux,
d'études ou de voyages de Thomas Koch, le fils d'Elvira. Conrad, qui
n'en demeurait pas moins un serviteur, finit par rompre avec Thomas.
Au moment où une vie sereine aux côtés d'une femme aimante
s'ouvre devant lui, les premiers symptômes de la maladie d'Alzheimer se
manifestent. Sa mémoire défaille sans prévenir. Paradoxalement
Elvira, qui traite tous les problèmes avec froideur et maîtrise
d'elle-même, commence à s'inquiéter : « Ca la rendait
nerveuse que Conrad au moment précisément où il semblait
perdre tout contrôle sur lui-même fût soustrait à son
influence. »
Les facultés de Conrad se dégradent de façon irréversible
mais pas de façon régulière et prévisible. Des souvenirs
très lointains refont surface sans crier gare...
Martin Suter s'est solidement documenté sur tous les aspects de cette maladie
qui fait davantage souffrir l'entourage que les personnes qui en sont atteintes. Les
attitudes diverses des soignants sont bien campées. L'auteur a un coup
d'il acéré sur quelques membres des milieux fortunés
suisses. En définitive un certain humour se dégage de cette histoire
déconcertante.
Le 17 novembre 2000
Samuel Holder