Dalva

de Jim Harrison

Éditions 10/18
Roman, 472 pages

Lorsqu'on s'engage dans la lecture de ce livre, on ne part pas pour une petite promenade tranquille mais pour une grande pérégrination dans les espaces du nord du Middle West et de la Californie, avec même une incursion au Sud de la Floride. Ce roman opère également une plongée vertigineuse dans l'histoire des Etats-Unis depuis plus d'un siècle ; plus particulièrement à l'époque des guerres contre les peuples indiens entreprises à la fin du XIXe siècle. Il montre que les plaies anciennes de l'Amérique sont toujours vivaces.

Nous sommes en 1986 dans une ferme prospère du Nebraska, avec ses chevaux, ses chiens, ses oies mais aussi ses serpents et ses coyotes qui rodent aux alentours. Dalva est une Américaine de 45 ans, belle, toujours active, toujours prête à monter sur sa jument pour un long périple, toujours prête à prendre un avion pour New York ou San Francisco pour régler un problème ou prendre un emploi. Elle a " un huitième de sang indien " dans les veines. Sa mère Naomi a grandi dans une famille pauvre pendant la Dépression des années trente et elle a épousé un fermier en partie d'origine indienne qui s'est maintenu à flots et est devenu riche. Le père de Dalva est mort pendant la guerre de Corée.

Dalva a exercé plusieurs métiers surtout sociaux en milieu urbain. Les horreurs d'une société détraquée par le pouvoir de l'argent et la misère qu'il entraîne, elle connaît de première main. Un de ses employeurs donne cette appréciation sur elle : " femme énergique, efficace et chaleureuse, dépourvue de toute qualité de chef. " A un moment de sa vie, Dalva porte cette appréciation sur elle-même : " j'étais trop impulsive et uniquement préoccupée du présent ; moyennant quoi je me désintéressais vite de toute stratégie globale. " (page 345).

Plusieurs quêtes douloureuses sont menées en parallèle : pour Dalva, celle du jeune Indien, Duane, qu'elle a aimé passionnément et celle du fils qu'elle avait eu avec lui à l'âge de seize ans, abandonné à une famille adoptive. Michael, universitaire cynique, alcoolique et drôle, mène l'enquête sur le passé sioux de la famille de Dalva, jalousement préservé jusqu'alors des curiosités malsaines.

Jim Harrison parle des êtres humains avec autant de fougue, de générosité que de délicatesse. Il rend leurs relations avec l'histoire, les paysages et les animaux du grand ouest américain de façon très prenante.

Ceux qui auront aimé " Dalva " doivent savoir ce qu'il leur reste à faire : lire " La route du retour " (en 10/18) qui en est la suite tout aussi passionnante.

Le 27 juin 2000

Samuel Holder

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