Un petit boulot

de Iain Levison

Éditions Liana Levi piccolo (août 2004)
roman traduit de l'américain, 211 pages

Le titre original de ce roman est « Depuis les licenciements » (Since the Layoffs). L'éditeur français lui a substitué « Un petit boulot » mais ce titre convient bien aussi. Après une vague de licenciements qui a complètement sinistré une petite ville, en l'occurrence américaine, il faut bien se résigner à chercher un petit boulot.

Jake est un jeune qui est en train de tout perdre, son travail qualifié, sa petite amie, son branchement au câble, ses appareils ménagers et bientôt probablement le respect le plus élémentaire de lui-même. Jake est prêt à accomplir n'importe quel petit boulot plutôt que de sombrer. Son copain Tommy est prêt à le dépanner en l'embauchant dans le petit drugstore-station à essence dont il est le gérant. Jake retrouve la sensation d'un travail épuisant mais en plus mal payé. Douze heures par nuit à remplir des pots de café, laver par terre, remplir les présentoirs et gérer certains clients mauvais coucheurs. Tommy travaille tout autant, avec l'angoisse d'être viré par la hiérarchie de la chaîne Gas'n'Go si les profits générés par son magasin sont jugés insuffisants. Sans parler de toutes les règles commerciales, sécuritaires et légales qu'il faut appliquer scrupuleusement pour ne pas avoir d'ennuis. « Je trouve bizarre que toutes ces règles soient appliquées de façon plus stricte que jamais, alors que la ville est devenue pratiquement une poubelle. On pourrait penser que ces choses-là n'ont plus d'importance, qu'on devrait nous laisser tous nous effondrer en paix. Mais non. Les règles sont les règles. » (p. 49)

Là où plus grand-chose ne fonctionne, il y a encore la police qui est en état de marche. Et les mafieux.

« Dans une ville où les trois quarts des hommes ont été licenciés au cours des neuf derniers mois, les affaires qui profitent du désespoir sont florissantes. » (p. 12) Le bookmaker Ken Gardocki a un bon job peu fatigant à proposer à Jake. S'il était prêt à tuer certaines personnes avec la même conscience professionnelle qu'il avait dans l'usine de pièces de tracteurs qui l'a licencié, il épongerait ses dettes de jeux et pourrait s'en sortir rapidement.

Problème moral ? Non, dans un monde où les gros bonnets de la finance peuvent saccager la vie de toute une ville sans état d'âme ni choc en retour, la morale a été liquidée avec le reste. Ce qui ne veut pas dire que Jake est devenu un tueur qui a perdu « tous ses repères ».

On lira avec plaisir cette histoire pleine de colère ironique contre l'injustice sociale.

Rire (noir) garanti.

Le 29 octobre 2004

Samuel Holder

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