La Chine occupe une place importante et spécifique dans le dispositif mondial de domination du Capital. En cette période de crise affectant le monde entier, de nombreux observateurs s'interrogent sur l'orientation que les dirigeants chinois sont susceptibles d'adopter au plan national comme au plan international. Pour cerner cette question, il semble nécessaire d'essayer de comprendre quelques aspects du fonctionnement de la société chinoise, des rapports entre les classes, les couches sociales et les différents organes de pouvoir. Cela conditionne les décisions à venir des dirigeants à la tête de l'État qui sont d'une extrême sensibilité aux pressions sociales et aux risques de mouvements explosifs pouvant survenir.
Deux données historiques majeures sont à avoir à l'esprit
pour comprendre la situation actuelle de la Chine qui est effervescente à plusieurs titres.
La première concerne l'ensemble du vingtième siècle au cours duquel ce pays a
connu un grand nombre de soulèvements révolutionnaires, d'émeutes, de
mouvements de protestation et d'enthousiasme qui ont été en règle
générale dévoyés ou réprimés férocement. En
dépit des vagues de répression récurrentes et de longue durée, le corps
social chinois n'est toujours pas apathique.
Les mouvements n'ont pas été seulement contre les injustices sociales mais aussi pour
la démocratie. Les mobilisations visant à la démocratie et à la
modernisation de la Chine depuis le XIXe siècle jusqu'au mouvement de 1989 ont
été systématiquement brisées, trahies ou délaissées par
ces États occidentaux qui se targuent d'adorer la démocratie et les droits de
l'homme. Ce qui n'a pas empêché bien des commentateurs occidentaux de déplorer
le caractère soumis du peuple chinois qui serait censé avoir un penchant
invétéré à subir des régimes dictatoriaux et totalitaires.
Certains du reste, parfois les mêmes, prétendent que la démocratie serait
grosse de dangers pour la Chine. Cette opinion est une forme d'aveu cynique qu'on a affaire
à une population turbulente et potentiellement dangereuse pour la bonne marche des affaires
des capitalistes et même du monde.
La deuxième donnée historique majeure concerne les trente dernières
années au cours desquelles la société chinoise a subi les transformations les
plus radicales et les plus massives de son histoire dans un pays qui a pourtant connu toutes sortes
de mutations et de traitements de choc en particulier depuis l'incursion des puissances
européennes au XIXe siècle. De 1978 à 2008 une population qui
représente un cinquième de l'humanité a été contrainte de
gré ou de force à s'intégrer au capitalisme global et à y jouer un
rôle stratégique comme « usine du monde ». Le taux d'urbanisation qui
était de 17,92 % en 1978 est passé à 43,9 % en 2006 ! Il faut rappeler
très rapidement comment le processus s'est fait en deux temps car il explique les conditions
dans lesquelles vivent actuellement un milliard trois cents millions de Chinois.
Tours d'habitation à Shanghaï | « Carrefour » à Nankin |
IKEA à Shanghaï | Les publicités aux abords de Suzhou |
Sans pouvoir ici revenir sur la période qui va de 1949 à la mort de Mao en 1976, il faut signaler quelques atouts et opportunités qui ont rendu la Chine attractive pour les grandes firmes capitalistes dans les années quatre-vingts : des infrastructures fondamentales suffisamment développées, des traditions de commerce très ancrées et persistantes dans certaines couches sociales et surtout une main d'œuvre surabondante et alphabétisée pour un coût salarial faible grâce à la complaisance d'un régime lui imposant une discipline sévère.
La politique d' « ouverture et réforme » a été
initiée par Deng Xiaoping en 1978. La première réforme qui s'achèvera
en 1984 vise à en finir avec la collectivisation rurale. Les communes populaires sont
démantelées. On retourne à des exploitations familiales en leur accordant le
droit de commercialiser une partie de leur production qui va d'ailleurs fortement progresser. La
main d'œuvre rurale en surnombre est absorbée en grande partie dans les petites
manufactures créées dans les bourgs dont le nombre se multiplie très vite
après 1985. De 52,08 millions de salariés employés dans ces manufactures en
1985, on est passé à 95,46 millions en 1988.
L'ouverture du pays aux marchandises, aux techniques et aux capitaux étrangers commence en
1979 par la création de quatre zones économiques spéciales dans les provinces
côtières méridionales. Elles accueillent des capitaux étrangers ou de
chinois d'outre-mer qui bénéficient d'exonérations fiscales, d'exemptions
douanières et d'infrastructures offertes. Elles accueillent une main d'œuvre de jeunes
(en majorité de femmes) surexploités et confinés dans des dortoirs.
Parallèlement les directions des entreprises d'État sont poussées à se
rentabiliser en ayant la possibilité d'embaucher sous contrat et de licencier, en recourant
au crédit bancaire et en n'étant pas obligé de reverser toutes leurs recettes
à l'État. Il est du coup admis qu'elles peuvent tomber en faillite. Le régime
devient très tolérant à l'égard de la création d'une multitude
de micro-entreprises. L'État-parti a confié aux gouvernements provinciaux et locaux
des responsabilités fiscales, des droits de propriété sur les entreprises
d'État et sur les terrains urbains. Les féodalités de bureaucrates affairistes
se jettent avec avidité sur toutes les opportunités de s'enrichir aux dépens
des paysans et des citadins. Ils ont le droit de traiter directement avec des investisseurs
étrangers. Progressivement les gouvernements régionaux et municipaux s'adjugent la
plupart des prérogatives d'un Etat local qui est aussi un entrepreneur incontournable.
A ce stade, à l'échelle de cet immense pays, le capitalisme dans ses formes
évoluées n'a encore qu'un caractère marginal. Mais plusieurs facteurs vont
nourrir les mécontentements aboutissant à la crise politique et sociale du printemps
1989. Les déséquilibres régionaux sautent aux yeux, de même que le
développement de la corruption tous azimuts. De plus en plus d'ouvriers font
l'expérience entièrement nouvelle qu'ils peuvent perdre leur emploi et les garanties
sociales qui y étaient liées. Les paysans se plaignent d'être
rançonnés par toutes les taxes inventées par les autorités locales pour
s'enrichir sur leurs dos. Le pouvoir d'achat des classes populaires est rongé par une
inflation importante.
La contradiction est béante entre le comportement de bureaucrates qui s'en mettent plein les
poches et leur prétention à défendre avec rigueur les valeurs du «
socialisme ». Devant les menaces émanant de la société, l'appareil
central du Parti Communiste est divisé sur la conduite à tenir : mettre un frein
à « l'ouverture et la réforme » ou l'accélérer ?
C'est dans ce contexte qu'éclate le mouvement contestataire des étudiants de
Pékin le 17 avril 1989. Dans les jours qui suivent, il touchera également de
nombreuses universités dans les villes de province et deviendra puissant notamment à
Nankin, Wuhan et Shanghai. A Pékin quelques slogans dans les cortèges
étudiants donnent la tonalité : « Vive la liberté ! Vive la
démocratie ! A bas la corruption ! A bas la bureaucratie ! »
Le mouvement prend son essor le 27 avril. Ce jour-là le cortège des étudiants
parvient à forcer une douzaine de barrages policiers sous les applaudissements d'un million
de personnes massées sur les trottoirs. Ils escaladent les camions du 38e corps
d'armée pour fraterniser avec les soldats. A la nuit tombée, 200 000 jeunes occupent
la place Tienanmen. Le 13 mai, 3 000 étudiants entament une grève de la faim pour
imposer un dialogue aux dirigeants. Plus que jamais les étudiants sont
considérés par la population comme des héros. Au grand dam du pouvoir, la
visite officielle de Gorbatchev est fortement perturbée. La manifestation la plus importante
à laquelle se joindra la population réunit deux millions de personnes le 18 mai. Une
frange de travailleurs de Pékin commence à mettre sur pied un syndicat
indépendant et à apporter un soutien actif au mouvement. Les bureaucrates
préparent la répression. Le 19 mai la loi martiale est décrétée,
ce qui ne fait que mettre toute la ville en ébullition. Le 21 mai les étudiants et la
population bloquent les convois militaires qui convergent vers la ville. Au cours d'une nouvelle
manifestation d'un million de personnes le 23 mai, les slogans se sont radicalisés : «
Li Peng, démission ! », « Levez la loi martiale ! », « Deng
Xiaoping, vieux con ! L'argent que tes fils ont volé, on te le donne, mais fous le camp !
»
Le journaliste Éric Meyer relève que la délinquance a baissé et que
« gentillesse et bonne volonté règnent sur la ville » tandis
qu'un ambassadeur jauge ainsi la situation : « Pékin donne l'impression d'une
« anarchie joyeuse et raisonnée. »
Le pouvoir va profiter du déclin de la mobilisation les jours suivants. Dans la nuit du 3 au
4 juin, ce mouvement qui aura duré deux mois est noyé dans le sang par plusieurs
corps d'armée place Tienanmen et aux alentours. Bien des étudiants et des
travailleurs présents se battent avec une détermination farouche, dressent des
barricades, escalades des tanks, brûlent des blindés. Bilan de la répression :
probablement plusieurs milliers de morts (beaucoup de corps ont été
éliminés) et plusieurs dizaines de milliers d'arrestations et de condamnations dans
tout le pays. Plusieurs ouvriers seront condamnés à mort et exécutés.
La terreur se poursuivra pendant deux ans qui seront par ailleurs mis à profit par le
pouvoir pour créer les bourses de Shanghai et de Shenzhen.
Deng Xiaoping et son équipe ont en fait renforcé les conditions
favorables à l'accélération du processus capitaliste en écrasant ce
mouvement. La jeunesse étudiante est durablement éliminée de la scène
comme force pouvant exprimer et accompagner les mécontentements et revendications de toute
la population.
En 1992 la relance du processus d'ouverture au capitalisme mondial et le concept «
d'économie socialiste de marché » sont proclamés par Deng Xiaoping. Les
capitalistes étrangers sont rassurés par un régime qui tient la boutique d'une
main de fer et qui va s'employer plus que jamais à lui fournir une main d'œuvre
exploitable à merci. D'un autre côté l'oligarchie au pouvoir ne peut se
maintenir durablement en place qu'en essayant de regagner une légitimité sur le
terrain des succès économiques et donc d'une croissance forte.
A la suite de réformes administratives, les entreprises rurales patinent, disparaissent ou
fusionnent ce qui pousse une première vague de migrants à chercher du travail dans
les grandes villes et les zones côtières. Le système de planification est
supprimé en 1993. L'Etat se débarrasse des petites et moyennes entreprises
déficitaires pour se concentrer sur les 10 000 plus grosses. Par le biais des faillites, des
fusions et des privatisations, le nombre des entreprises d'État est passé de 127 000
en 1996 à 61 300 en 1999. Pour englober une plus grande période et saisir l'ampleur
du choc pour les ouvriers dans les industries d'État, il faut relever que leur nombre est
passé de 45 millions en 1992 à 21 millions en 2003.
La relance effective des réformes en 1993 s'accompagne d'une agitation ouvrière
intense avec 6 320 grèves cette année-là mobilisant 320 000 personnes On
relève 210 cas d'actes de rébellion dans les villes. Le district de Renshou dans le
Sichuan est secoué par de grandes manifestations de paysans.
1994 est marqué par une grande vague de licenciements qui sera suivie par d'autres. En 1995
on compte 480 000 personnes ayant participé à 3 700 grèves. L'opération
de grande ampleur consiste à se débarrasser d'une bonne partie du personnel des
entreprises d'Etat qui fusionnent ou disparaissent. Très fréquemment les salaires des
travailleurs encore en poste ne sont pas payés pendant des mois. Le séisme est
d'autant plus brutal que la hausse des prix est de 85,3 % entre 1993 et 1996. Cette
année-là, le ministre du Travail et de la Protection sociale (sic) annonce la fin de
la pratique de l'emploi à vie. En 1997 l'État-parti réussit à
maîtriser l'inflation mais en même temps il décide de déréguler le
montant des loyers, des frais médicaux et des frais de scolarité qui vont partir en
flèche à la hausse. Le capitalisme à visage brutal se dévoile sur
toutes ses facettes.
A marche forcée, en respectant toutes les injonctions du FMI et de la Banque mondiale en
faveur du Capital et en prenant toutes les mesures précarisant les travailleurs et
réduisant la couverture sociale de la population en peau de chagrin, la Chine est admise en
2001 comme membre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ; ce qui va offrir de nouvelles
opportunités d'enrichissement à ses couches dirigeantes. En 2004 la Chine est la
troisième puissance commerciale du monde derrière les États-Unis et
l'Allemagne.
Comme exemple parmi bien d'autres de l'intégration de la Chine au capitalisme mondial, on
peut évoquer sa présence en Afrique. Elle y est actuellement le deuxième
partenaire commercial derrière la France. Sur ce continent où ses entrepreneurs sont
particulièrement actifs depuis le milieu des années 90, elle contrôle 900
entreprises et a investi dans le pétrole, les infrastructures, les télécoms,
le textile, le tourisme, l'industrie alimentaire, etc. Sur les 500 000 à 750 000 Chinois se
trouvant en Afrique, on retrouve la même disparité de conditions qu'en Chine, du
milliardaire bichonnant les autorités locales pour avoir les passe-droits et une protection
policière au simple ouvrier migrant mal payé, mal logé et aussi
surexploité que dans son pays d'origine.
La mise en orbite de la Chine dans le système capitaliste mondial a
été accompagnée de mouvements de protestations qui n'ont pas cessé et
qui n'ont pas diminué en intensité d'après la plupart des observateurs. Les
statistiques officielles avaient relevé 87 000 manifestations et violences collectives en
2006. Depuis aucun chiffre n'a été publié mais divers reportages ont
relaté nombre de manifestations contre toutes sortes d'injustices. Elles mobilisent des
ouvriers, des paysans et aussi des citadins des couches moyennes qui créent de fait des
espaces de protestation et parfois de négociation nouveaux. Le recours des plaintes en
justice auprès des administrations est de surcroît de plus en plus fréquent,
comme le cas du lait contaminé pour enfant l'a montré encore dernièrement. Les
mobilisations contre les diverses formes de pollution massives et catastrophiques sont le plus
souvent le fait de paysans. A Dachuan, un village du Gansu, ils se sont insurgés contre la
pollution de l'eau par une usine d'engrais. Ils ont exigé que les cadres boivent des
bouteilles d'eau en provenance de la rivière contaminée. Des jeunes villageois ont
réussi à les contraindre à prendre des mesures en déversant de l'eau
contaminée pendant dix jours par-dessus le mur de l'usine.
En mai-juin 2007 de grandes manifestations ont eu lieu à Xiamen pour s'opposer à la
construction d'un gigantesque complexe pétrochimique devant produire du paraxylène.
Cela s'est accompagné d'une campagne d'un million de SMS. Le projet de construction a
été suspendu par le vice-maire. Le 28 juin 2008, une manifestation de 30 000
personnes à Wengan (province du Guizhou au sud) s'est transformée en bataille de rue.
Cent personnes ont été arrêtées. A l'origine il y avait la colère
contre le fils d'un responsable local tenu pour responsable du viol et du meurtre d'une jeune fille
de 17 ans, et protégé par la police.
Récemment pendant trois jours à partir du 17 novembre, des heurts violents avec la
police anti-émeute se sont produits avec plus de 10 000 personnes dans la petite ville de
Longnan dans le Gansu au Nord-Est. La cause de ce mouvement a été dans ce cas
l'expropriation de paysans de leur terre pour construire un nouveau centre administratif. D'autres
évènements du même ordre se sont produits dans le Yunnan et dans le Hunan. Ces
jours derniers des grèves de chauffeurs de taxis ont paralysé certaines villes.
La Chine est un pays de turbulences sociales multiformes et permanentes, aussi bien dans les villes
que dans les campagnes comme on va continuer à le voir.
Les travailleurs migrants issus de la campagne, les « nongmingong »
(ouvriers-paysans), attirent parfois l'attention des journalistes occidentaux par leurs actions
vigoureuses. En janvier 2005 des migrants furieux de ne pas avoir été payés
ont saccagé un grand magasin Wall Mart. En juillet 2008 à Kanmen, au sud de Shanghai,
un migrant a été battu par la police qui refusait de lui attribuer un permis de
résident. Une centaine de ses camarades ont protesté. Le mouvement s'est
amplifié et un millier de migrants se sont battus pendant trois jours avec la police. 23
émeutiers ont été arrêtés. Ces épisodes sont significatifs
de ce que ces travailleurs dépourvus de tous les droits peuvent se battre collectivement
pour se faire respecter. Les dirigeants de l'Etat semblent envisager de leur accorder quelques
droits et garanties salariales minimales. Reste à savoir si leurs intentions seront suivies
d'effets car pour l'heure sur le terrain le système du « hukou », du permis de
résidence, reste en vigueur.
Sa confiscation par la police est un moyen de pression très efficace. Ainsi des jeunes des
campagnes et des villes ont été empêchés de se rendre à
Pékin pour les Jeux Olympiques car on leur a confisqué leur « hukou ». Le
régime a sans doute voulu éviter que se combinent des oppositions multiples : celles
de la fraction de la population de Pékin victime d'un hold-up de grande envergure par les
promoteurs immobiliers et celles des jeunes qui n'attendent qu'une occasion pour en découdre
avec les flics.
La société urbaine est dédoublée en résidents et
non-résidents. Le permis de résidence dans une ville s'accompagne d'avantages sociaux
divers même s'ils sont de plus en plus restreints. Des villes comme Shanghai embauchent
prioritairement des travailleurs résidents. Les migrants sont confrontés à des
discriminations et au harcèlement policier. En même temps leur présence est
souhaitée par les autorités locales car une foule d'entrepreneurs et de citadins
aisés profitent de leur travail. Ils sont indispensables au fonctionnement d'une
série de secteurs : le bâtiment, la collecte des déchets, les transports, le
portage de charges lourdes, la garde d'enfants et divers services et petits commerces. Les migrants
qui seraient actuellement près de 200 millions forment un tiers de la population urbaine.
Ils peuvent être licenciés sur le champ et n'ont aucun droit en matière de
frais médicaux, de retraite, d'allocation chômage ou de logement. Ce sont des
sans-papiers de l'intérieur qui cherchent à être régularisés et
à s'en sortir au prix d'une mobilité professionnelle et géographique leur
donnant au passage une grande expérience sociale qu'ils mettent à profit à la
longue pour se défendre de mieux en mieux. Des réseaux de solidarité se
créent parmi eux, souvent à partir de l'origine régionale. Toute
l'économie chinoise est donc irriguée par le travail des migrants, y compris celle
des villages où nombre d'entre eux reviennent avec de l'argent à l'occasion du nouvel
an chinois.
Réparateur de vélos sur un trottoir de Pékin | À Shanghaï, un ouvrier migrant au milieu de résident |
Ouvriers du bâtiment à Pékin |
L'implication des travailleurs migrants dans des grèves et manifestations a
été importante depuis cinq ans, particulièrement dans les usines du sud qui
sont le plus souvent de véritables bagnes quant aux conditions de travail et d'habitat, et
où les salaires sont misérables, les heures supplémentaires fréquemment
non payées. L'exposition à des produits dangereux a aussi été à
l'origine de certaines grèves. Quatre conflits ont été particulièrement
âpres entre 2004 et 2006 chez Computime, Gold Peak, Stella et Uniden. En novembre 2007, 1 500
travailleurs migrants de la compagnie Alco ont bloqué la principale route d'accès
à la ville de Dongguan et réussi à obtenir l'annulation d'une augmentation de
75% du prix de la cantine.
La situation de nombreux travailleurs résidents n'est pas brillante pour autant. Il semble
que le taux de chômage soit d'au moins 11 % en Chine. Les vagues de licenciements depuis
quinze ans dans les industries d'Etat ont expédié des millions de gens en retraite
anticipée ou au chômage avec des indemnités dérisoires qui ne sont pas
toujours versées. Des mobilisations parfois violentes et de grande ampleur ont
éclaté de 1996 à 2004 à propos de fermetures d'entreprises, de
malversations des directeurs, de non paiement des salaires ou d'indemnités de licenciement
insuffisantes. Jean-Louis Rocca dans « La condition chinoise » relate une
série de manifestations de masse violentes auxquelles il a parfois assisté. «
A Mianyang (Sichuan), en juillet 1997, plus de 100 000 personnes se sont rassemblées
pour manifester, on a dénombré 100 blessés et 80 arrestations. »
Dans de nombreuses villes les manifestations ouvrières ont tourné à
l'émeute, avec des bâtiments officiels et voitures de police incendiées.
« A Yangjiazhan, la fermeture d'une mine en avril 2000 a déclenché une
émeute impliquant 20 000 mineurs. Des policiers et soldats ont tiré en l'air. Enfin,
dans la première moitié de l'année 2002, de multiples manifestations ont
éclaté à Liaoyang, rassemblant parfois jusqu'à 30 000 personnes.
» En 2002 les manifestations de 80 000 ouvriers du pétrole à Daqing ont
duré dix jours pour obtenir une meilleure indemnité de licenciement. La mobilisation
la plus longue s'est produite en 2004 devant la fabrique textile de Xianyang Huarun où un
piquet de grève a duré six semaines 24 heures sur 24.
Il est remarquable que de nombreux anciens ouvriers au chômage ou à la retraite
continuent pendant longtemps après leur licenciement à mener des actions collectives,
bloquant des voies ferrées, des axes routiers ou des bâtiments officiels pour arracher
de meilleures prestations ou simplement obtenir une pension.
La combativité des travailleurs chinois est flagrante mais les liens entre les deux
principaux segments de la classe ouvrière (migrants et résidents à demeure)
sont faibles. La possibilité de s'organiser de façon autonome est interdite et donc
fugitive, le temps d'un mouvement. La Fédération des Syndicats de Chine est un
appendice du Parti au service des patrons.
Il ressort aussi de ces conflits souvent violents que le pouvoir central cherche plutôt
à laisser les autorités locales se débrouiller pour trouver le cocktail
adéquat dans chaque cas de figure de répression, négociations et concessions,
quitte à intervenir s'il y a lieu en démissionnant des responsables ou en
emprisonnant des directeurs véreux. Tant que le régime n'est pas contesté en
tant que tel au nom de la démocratie, il sous-traite aux échelons régionaux et
locaux les contestations sociales.
C'est également le cas dans les campagnes où les paysans sont loin
d'être passifs et fatalistes comme on l'a vu face à des problèmes de
dégradation de leur environnement pouvant entraîner de graves maladies ou la ruine de
leurs activités productives.
A cela s'ajoute les agressions contre leur niveau de vie. La colère collective est
attisée en permanence par l'activité prédatrice des autorités locales
qui inventent des taxes à foison qui appauvrissent les paysans et sont ressenties comme
arbitraires. La guérilla contre ce racket fiscal est d'autant plus vive que le revenu des
campagnes a baissé ces dernières années sauf dans certaines régions
à proximité de grandes villes où il y a eu parfois un enrichissement certain.
Les autres raisons de mobilisations paysannes sont les expropriations faiblement indemnisées
pour cause d'implantation d'usines, de construction d'équipements publics tels que le
barrage des Trois gorges, ou pour des opérations immobilières très lucratives
pour les promoteurs.
Parmi les centaines de manifestations et d'accrochages sévères qui ont lieu chaque
années entre les paysans et la police, il est intéressant de citer celle de 2000
paysans du district de Ningguo (Anhui) en 1993 où l'on pouvait lire sur des pancartes
« A bas les nouveaux propriétaires fonciers des années 1990 »,
« Tout le pouvoir aux paysans ». En 2000 dans le district de Yandu (Jiangxi),
20 000 d'entre eux se sont battus contre le niveau des impôts. Trois paysans ont
été tués mais des dirigeants locaux ont été
destitués.
Les paysans utilisent les canaux des instances qu'ils ont le droit d'élire : les
Comités villageois et les Réunions des représentants des villageois. On a
observé que la tendance des acteurs des mobilisations était d'essayer
d'étendre leur mouvement à d'autres villages avec le mot d'ordre de «
réduire le fardeau paysan ».
Paysans travaillant entre Suzhou et Shanghaï | Une maison de nouveau riche à la campagne |
Cai Chongguo a participé au mouvement de Tienanmen et il est correspondant
à Paris de la revue « China Labour Bulletin » qui paraît à
Hong Kong. Il explique aux auteurs de « China blues » : « Après 1989,
la situation s'est complètement inversée et le pouvoir a compris qu'il fallait
acheter les intellectuels. » Pour autant un certain nombre de gens des couches moyennes
qui sont évaluées à environ 100 millions de personnes ne dédaignent pas
de s'impliquer dans certains mouvements sur un problème écologique ou de santé
publique, ou même aux côtés de citadins moins fortunés quand il s'agit de
projet d'expulsion d'un immeuble ou de tout un quartier. Certains avocats et étudiants en
droit s'impliquent pour aider sur un plan juridique des travailleurs se battant pour leurs droits
ou des victimes de scandales comme celui du lait pour enfant. Quelques intellectuels et
journalistes ont une activité critique dans différents domaines et utilisent
largement internet.
Dans « La société chinoise vue par ses sociologues », Chen
Yingfang analyse en détail quatre mobilisations à Shanghai où l'on voit que
les milieux intellectuels peuvent se mobiliser contre un projet immobilier, l'incurie ou les
malversations d'une société régisseuse, en utilisant leur compétence
juridique. Il ressort que lorsqu'il faut pousser plus loin la lutte, ce sont plutôt les
retraités et les travailleurs indépendants qui sont les plus déterminés
car ils sont plus à l'abri des pressions des autorités et des promoteurs sur les
employeurs.
Appartements à Canton | Vieilles habitations à Shanghaï avant démolition |
Certains scandales ont un caractère qui fédère le mécontentement de toutes les classes sociales. Au printemps 2008, lors du tremblement de terre au Sichuan, qui a fait 80 000 morts, toute la population était en colère contre les cadres locaux et les entrepreneurs qui avaient fait construire avec de mauvais matériaux des écoles qui se sont effondrées sur des centaines d'enfants ; alors que les écoles construites par une ONG de Hong Kong sont restées debout. Pour calmer leur colère, le chef d'État Hu Jintao et le premier ministre Wen Jiabao ont mobilisé de gros moyens humains et matériels pour secourir les victimes. Leur préoccupation est de ne pas laisser les régions pauvres de l'ouest ou de l'ancien nord sidérurgique à l'abandon, sous peine d'avoir à affronter des explosions sociales de grande ampleur.
Les « réformes » économiques ont particulièrement
frappé les femmes des classes populaires. Cai Chongguo indiquait en 2007 : « China
Labour Bulletin a réalisé une enquête en 2005 dans les provinces du
centre. La plupart des jeunes salariés étaient des femmes de 14 à 16 ans,
fabricant des jouets, des vêtements et des chaussures. Leurs salaires étaient moindres
que ceux des hommes, même pour celles qui travaillaient plus que les hommes.
Le harcèlement sexuel est monnaie courante dans les entreprises. En Chine du Nord, les
femmes sont parfois battues par leurs maris et les chômeuses sont souvent contraintes de se
prostituer. Il existe en Chine au moins 6 millions de prostituées. »
Dans les campagnes le poids de traditions tyranniques toujours vivaces à l'égard des
filles explique leur fuite vers les villes et de nombreux suicides. Le taux de suicide en Chine est
supérieur à la moyenne internationale. Dans une proportion avoisinant 60%, les
suicidés sont des femmes (150 000 par an) et le pourcentage est encore plus
élevé dans les zones rurales. Xinran, une ancienne animatrice radio à Nankin a
publié des témoignages poignants sur le parcours de femmes qui révèlent
une formidable combativité individuelle pour aider leurs proches et pour s'émanciper.
Ces qualités se sont également exprimées avec vigueur dans diverses
grèves dans le sud ou encore dans des mobilisations pour la défense de logements.
Ouvrières dans une fabrique de soie | Jeune mère à Nankin |
La lessive au bord du fleuve à Guilin |
De ce tableau sommaire, on ne peut dégager aucune prévision quant
à l'avenir des luttes sociales en Chine. Il est clair que la combativité reste
à un haut niveau dans les classes sociales les plus durement exploitées et que
progressivement, avec l'intervention aussi de salariés aisés ou des professions
libérales, une pression forte s'exprime pour dégager des espaces d'expression et de
contestation du régime qui joue de ses organes décentralisés pour esquiver les
coups. Le pourra-t-il encore longtemps ? Tout le monde s'en méfie. Le Parti communiste
chinois est en lui-même un corps social de 70 millions de membres qui a intégré
ces dernières années de plus en plus d'hommes d'affaires et de carriéristes
issus des universités. Cela ne lui donne pas une grande assise sociale d'autant plus qu'il
est divisé en une équipe centrale et une série de pouvoirs régionaux et
locaux difficiles à contrôler.
Sur le plan de la manipulation des esprits, la seule carte du pouvoir est d'agiter de temps
à autre les thèmes nationalistes à propos du Japon, de Taïwan ou de la
Corée du Sud. Mais il ne peut pas pousser le bouchon trop loin dans cette direction car ce
sont aussi des partenaires vitaux pour l'économie chinoise. Sa rhétorique
confucéenne sur la nécessité de construire une « société
harmonieuse » ne peut guère illusionner une population confrontée au quotidien
à de terribles difficultés. La seule légitimité de l'oligarchie
bureaucratique et affairiste est d'apparaître comme garantissant un espoir de progrès
grâce à la croissance. Les effets de la crise risquent d'éroder cette
légitimité et d'accentuer les mécontentements. Injecter une petite dose de
droits démocratiques et distribuer du revenu pour calmer les mécontentements risque
d'être lent et compliqué, à supposer que le régime soit capable de
s'arracher suffisamment à son bureaucratisme, à ses divisions internes et aux
pressions affairistes pour s'engager dans cette voie. Certes les dirigeants ont
décrété un grand plan de relance de 4 000 milliards de yuans (environ 455
milliards d'euros) pour contrer le ralentissement de l'économie qui a déjà mis
sur le carreau des milliers de migrants obligés de rentrer dans leurs villages. Cette somme
inclut des investissements déjà programmés et en plus, on sait qu'en Chine
près de 20% des capitaux investis par l'État dans des infrastructures
s'évaporent en cours de réalisation dans les poches des entrepreneurs et des
fonctionnaires. Les effets perceptibles de la relance pour la population risquent d'être
faibles et d'arriver bien après ceux de la crise. L'exaspération populaire risque de
prendre des formes et une dimension inédites. On imagine sans peine que les couches
privilégiées peuvent alors avoir recours à une répression de grande
ampleur, au cas par cas, avec le danger pour elles de mettre tout le pays en révolution.
Le 27 novembre 2008
L'article sur la société chinoise qui a été
publié dans le n°39 de Carré rouge constituait un premier jet. Grâce aux
remarques de plusieurs camarades et à quelques lectures complémentaires, j'ai
rédigé trois semaines plus tard une version nettement plus étoffée qui
se trouve ci-dessus.
Sans énumérer tous les points qui ont été précisés ou
mieux documentés, je voudrais attirer l'attention sur les principaux sujets qui ont
été développés et aussi faire quelques remarques suscitées par
les turbulences de la situation sociale en Chine dans les dernières semaines de
l'année 2008 et dans les premiers jours de 2009.
Dans les pays occidentaux la mémoire des évènements de Tienanmen se focalise
avant tout sur son écrasement. Le passage dans l'article concernant Tienanmen a
été un peu développé pour donner une meilleure idée du
caractère radical et enthousiaste du mouvement étudiant du printemps 1989 qui
était en passe d'entraîner des fractions importantes de la population. Les
archives de Tiananmen de Zhan Liang ont été mentionnées dans la
bibliographie.
Parmi les nombreuses raisons qui mobilisent les paysans et les ouvriers migrants, j'ai
ajouté les questions de pollution en donnant des exemples qui montrent que ces
catégories sociales sont pour l'instant infiniment plus combatives sur ce terrain
écologique que les couches urbaines aisées. Cependant, certains liens commencent
à s'établir comme je le mentionne, entre d'une part les ouvriers et les paysans, et
d'autre part des étudiants en droit, des avocats et des journalistes ayant à
cœur de les aider à faire valoir leurs droits et à dénoncer des
scandales comme celui du lait pour enfants contaminé à la mélamine.
La brochure très bien documentée de l'Union syndicale Solidaires consacrée
à la Chine m'a permis d'ajouter quelques compléments nécessaires sur les
grèves de ces dernières années, en particulier dans le sud du pays. J'ai
ajouté dans la bibliographie la référence au roman de Liu Qingbang, Le
puits, qui donne un aperçu des conditions de travail et d'existence terrifiantes de
certains migrants de l'intérieur, en l'occurrence dans les mines privées.
Une partie nouvelle aborde la condition des femmes des classes populaires. Signalons au passage que
l'oppression des femmes est moins pesante, pour ne pas dire terrifiante, dans les villes, surtout
lorsqu'elles accèdent à un meilleur statut social. Outre les informations
éparses et rares que l'on peut trouver dans des ouvrages de sociologues ou de politologues,
la meilleure façon de se faire une idée forte et vivante de l'existence des Chinoises
est de lire des témoignages et des romans chinois assez nombreux sur cette question. Parmi
d'autres, je signale deux livres d'une journaliste et romancière, Xinran.
Les rapports entre l'État et la population sont plus complexes et ambivalents que ne le
laissent entendre la plupart des médias occidentaux. À l'occasion des Jeux
Olympiques, le régime a montré son visage le plus habituel c'est-à-dire
hostile et répressif à l'égard de la population en expropriant de nombreux
habitants, en emprisonnant les protestataires et en tenant à distance les jeunes et les
pauvres de la zone prestigieuse des jeux où les officiels voulaient se faire admirer du
monde entier. D'un autre côté ce même régime, par peur des
réactions populaires, s'est fortement préoccupé de mobiliser de gros moyens de
secours et d'aides diverses lors du tremblement de terre au Sichuan quelques semaines auparavant.
Toujours pour tenir compte de l'indignation dans la population à propos du lait
contaminé à la mélamine qui a provoqué la mort de six enfants et en a
intoxiqué 294 000, un premier procès vient d'avoir lieu à l'encontre d'une
vingtaine de personnes dont l'ex-directrice de l'entreprise laitière Sanlu qui encourt la
peine de mort ou la prison à perpétuité. Les indemnités et prises en
charge des soins sont jugées très insuffisantes par les familles. Deux cents parents
ont décidé de préparer une action en justice en dépit du
harcèlement policier et des pressions des officiels.
ans la dernière partie j'évoque rapidement les problèmes auxquels les
dirigeants sont déjà confrontés. Le Parti communiste chinois comportant 70
millions de membres est nécessairement un corps social parcouru par des tensions et des
intérêts politiques divers. Le régime apparaît ces dernières
semaines passablement désemparé par les premières conséquences de la
crise sur l'économie du pays. Elles sont multiples. La décrue dans l'industrie s'est
développée depuis les zones côtières exportatrices pour atteindre
ensuite les régions intérieures où se trouvent des entreprises
contrôlées par l'État. La plupart des branches de l'économie sont
à présent touchées plus ou moins sévèrement (sidérurgie,
hydrocarbures, textiles, automobile, compagnies aériennes, etc.).
De nombreuses usines ont été fermées dans le sud et dans le delta du
Yangtsé. Dans d'autres usines les salaires ont été diminués de 20
à 30 % ce qui a entraîné une vague de démissions. Avec des salaires
tombant à 900 ou 800 yuans (environ 90 ou 80 euros par mois), la situation des
salariés devenait intenable.
10 millions de travailleurs, surtout des migrants, ont déjà été
licenciés à la fin du mois de novembre. Des émeutes ouvrières
importantes ont éclaté, souvent au sujet des indemnités de licenciements
dérisoires ou inexistantes. Contrairement aux espérances de certains
économistes occidentaux, la redistribution du revenu pour relancer la consommation
intérieure et par voie de conséquence l'économie mondiale est donc grandement
compromise par le ralentissement d'ensemble de l'économie chinoise. Le régime est
obsédé plus que jamais par « la stabilité sociale ». Il
envisage un programme d'aide aux plus pauvres qui devrait concerner 43 millions de personnes au
lieu d'environ 14 actuellement. Mais en l'absence d'une véritable couverture sociale
concernant la santé, l'éducation et la retraite, il est probable que les familles
pauvres, et même celles qui sont relativement aisées, auront tendance plus que jamais
dans un contexte où le chômage est en pleine croissance, à épargner si
elles le peuvent plutôt qu'à consommer.
D'autres menaces sur la stabilité du régime et de la société
apparaissent. Le correspondant du Monde à Pékin relayait hier cette
estimation de l'Académie chinoise des sciences sociales (l'équivalent du CNRS),
à savoir que sur les 6,5 millions de nouveaux diplômés des universités,
un quart risque de ne pas trouver d'emploi en 2009.
Les protestations consécutives au fonctionnement et à la crise du capitalisme en
Chine peuvent finalement prendre diverses expressions politiques à court terme dans la
mesure où l'exigence d'une démocratisation du régime redouble de vigueur. La
Charte 08 demandant la garantie de droits démocratiques, des élections libres et la
fin du monopole du Parti communiste qui vient d'être publiée le 10 décembre en
est une des manifestations. Elle aurait recueilli quelques milliers de signatures tandis que son
principal rédacteur Liu Xiaobo, un ancien professeur de lettres et animateur du mouvement de
Tienanmen, a été incarcéré deux jours avant sa publication. Des
débats intenses semblent avoir lieu parmi les dissidents chinois sur les formulations de
cette Charte mais l'idée exprimée que « la démocratisation de la
politique chinoise ne peut plus attendre » a de grandes chances d'être largement
partagées dans la mesure où y compris des membres du Parti ont signé cette
Charte.
Bien que beaucoup plus nombreuses qu'il y a quelques années, toutes les informations qui
nous parviennent ne rendent probablement compte que faiblement de l'intensité et de la
qualité des contestations politiques et sociales à l'œuvre et en gestation dans
ce pays dont l'avenir est lié à celui du monde.
Le 5 janvier 2009
Samuel Holder
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