Journal de notre bordLettre no 172 (le 3 juin 2016)Bonjour à toutes et à tous, Le mouvement de longue haleine que nous pressentions dans notre lettre du 7 mars dernier s'est bel et bien déployé. Il a pris de multiples formes et il n'est pas près de se terminer. La lutte contre la loi El Khomri n'est que la partie émergée de l'iceberg, ce que des commentateurs n'ont pas compris ou ont fait semblant de ne pas comprendre. Nous ne luttons pas seulement contre la loi travail, mais aussi contre le monde qui l'exige, le petit monde du grand patronat, des super-riches et de leurs serviteurs, le monde du capital qui nous étouffe, nous exploite, gâche nos vies et détruit de plus en plus les conditions de la vie sur terre. Les centaines de milliers de travailleurs et les quelques milliers de jeunes lycéens et étudiants qui se sont mobilisés depuis trois mois pour arracher au gouvernement et au MEDEF le retrait de cette loi, ne sont pas d'humeur à capituler. Même si des leaders syndicaux s'avisaient malencontreusement de mettre de l'eau dans leur vin, nous ne renoncerions pas à lutter contre cette loi qui ouvre encore plus la voie à l'atomisation des forces de défense des salariés. Si le gouvernement avait l'extrême imprudence de ne pas retirer ce projet de loi d'ici l'été, il y a de fortes chances pour qu'il ait de graves ennuis plus tard. Un tenant de l'ordre établi a dit un jour qu'en France, il valait mieux éviter que la jeunesse se mobilise parce que lorsque le dentifrice est sorti du tube, on ne peut plus le faire rentrer à l'intérieur. En l'occurrence, la mobilisation des jeunes depuis mars n'a pas été très large sur le plan numérique. Mais elle a été déterminante pour chambouler le calendrier plan-plan des responsables syndicaux, et pour libérer l'énergie de tous les travailleurs combatifs dans un mouvement d'ampleur et de longue durée. Elle a redonné un coup de jeune à toutes les générations qui sont descendues dans la rue ou ont rejoint parfois les diverses places petites ou grandes de Nuit Debout. Si on tient absolument à comparer ce mouvement à ceux de 1995, 2003, 2006 et 2010, on pourra se rassurer en haut lieu, comme quoi il est numériquement moins important. Pour les gens de pouvoir, il n'y a que les chiffres qui comptent. Rassurons-les, si je puis dire par moquerie, ce n'est probablement qu'un début ! Ce mouvement a d'ores et déjà des effets encourageants et réconfortants pour qui n'est pas sourd et aveugle à la réalité humaine, qualitative, suscitée par cette mobilisation. Dans les semaines et les mois qui viennent, nous verrons si le mouvement du printemps 2016 n'aura pas finalement des caractéristiques potentiellement plus prometteuses que les mouvements antérieurs. ___________________________________ Vers la grève générale ? Debout nuit et jour ! L'État, bras armé du capital Un avenir de révolutions et contre-révolutions en Europe ? Des lectures pour comprendre, lutter, s'émanciper In situ ___________________________________ VERS LA GRÈVE GÉNÉRALE ? Est-ce à dire que nous nous acheminons inexorablement vers une grève générale ? Il serait aventureux de l'affirmer. Le thème de la grève générale travaille beaucoup l'esprit des syndicalistes combatifs et des militants de la gauche dite radicale ou révolutionnaire. C'est une spécificité française qui est un héritage de l'histoire de ce pays au siècle dernier. La grève générale avec occupations de juin 1936 ainsi que celle de mai 1968 apparaissent en quelque sorte comme des références absolues sur l'échelle de Richter de la lutte des classes en France. Ces deux expériences constituent le substrat réel, concret et passionnant à étudier, de ce qui se transforme trop souvent en mythologie, en prêt-à-penser de l'horizon de la lutte dès qu'un mouvement d'une certaine ampleur survient. Même quand on examine les autres expériences de grève générale qui ont eu lieu dans d'autres pays à différentes époques, on constate que la grève générale éclate le plus souvent par surprise, quand personne ne l'attend. C'est même un facteur assez décisif de son éventuel succès. La grève générale ne se construit pas, ne se décrète pas et surtout ne se réclame pas à des dirigeants syndicaux (inclusivement Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT) en qui nous n'avons pas à avoir confiance, ni à leur déléguer ce qui relève de la responsabilité de tous les acteurs de la lutte. D'ailleurs, ces dirigeants vont momentanément dans le bon sens seulement lorsque nous exerçons une pression forte et constante sur eux, comme le mouvement actuel en est l'illustration. Sinon, ils sont trop heureux de galoper à la table des négociations, le stylo en main pour signer des accords avant tout favorables aux employeurs. L'éventualité d'une grève générale n'est bien sûr pas à exclure, même si bien des éléments de la situation sociale en France y font encore obstacle et que nous devrions nous donner la peine d'analyser et de soupeser. Mais il est de toute façon utile de réfléchir à l'usage que nous ferions d'une grève générale si jamais elle se produisait. Laisserions-nous les scénarios bien connus se reproduire ? Quand on se focalise uniquement sur les gains revendicatifs de juin 36 et de mai 68, on peut considérer que la classe ouvrière a remporté la partie. Mais le rôle de frein et pour tout dire de trahison des directions syndicales et des partis de gauche parlementaires est aussi clairement établi dans les deux cas. Il en a été de même dans la grève générale en Belgique au cours de l'hiver 1960-1961. Se prémunir contre de telles issues qui se payent cher et parfois dramatiquement comme dans les années 1937 à 1939, consiste à se poser dès maintenant le problème du contrôle démocratique rigoureux de nos luttes actuelles et futures. Le volontarisme activiste même le plus sincère et déterminé ne peut pas régler cette question. Lorsqu'il s'agit de décider d'un blocage ou d'une grève localement, les assemblées générales permettent déjà de procéder démocratiquement dans bien des cas, en prenant en compte collectivement tous les arguments. C'est même grâce à cette façon de faire démultipliée dans de nombreux endroits que le mouvement a un réel dynamisme. Plusieurs défis se présentent à nous. Le premier est d'étendre le mouvement en le rendant de plus en plus populaire. Des actions vont déjà dans ce sens comme celles des électriciens qui ont mis la population en « heures creuses » dans la journée ou les manifestants qui ont rendu les péages d'autoroutes gratuits. L'objectif n'est pas tant de « bloquer l'économie » ce qui est non seulement difficile à réaliser mais ne gène pas en priorité les grosses entreprises. Il est plutôt de cibler ce qui ne gène pas les usagers et les travailleurs qui ne sont pas encore dans le mouvement, mais déplaît souverainement au gouvernement, aux gros actionnaires, aux banquiers et aux PDG comme Gattaz, Arnault, Bolloré, Niel ou Pinault. Quelques actions de cet ordre commencent à être mises en oeuvre. Il est réjouissant de voir que l'imagination commence à se développer sur ce terrain depuis quelques jours. L'autre défi est d'inventer, de créer toutes les formes autonomes et démocratiques nécessaires à tous les niveaux. Il est de débattre en permanence des grands enjeux devant lesquels, nous salariés, intérimaires, intermittents, précaires et chômeurs sommes placés. Le seul retrait de la loi travail ou du seul article 2 ne saurait en aucune façon nous satisfaire. Les empiétements du capital resteront incessants sur nos existences. Ils nous détruiront à petit feu si nous ne délivrons pas toute la société de ce carcan qu'est le système du profit. DEBOUT NUIT ET JOUR ! La nouvelle forme d'expression et de mobilisation qu'est Nuit Debout a manifestement dérangé les autorités en place. Au début de l'occupation de la place de la République, la maire de Paris, Anne Hidalgo, a eu recours à une formulation mémorable, en termes de novlangue dont parle Orwell. Elle s'est insurgée contre cette « privatisation de l'espace public » ! Elle s'est ensuite refusée à fournir des toilettes aux abords de la place de la République, contrairement à ce que font les services qu'elle dirige lorsqu'il y a des événements à Paris réunissant un grand nombre de personnes. Il fallait que le lieu devienne inhospitalier sur le plan sanitaire. La police s'est ensuite bien dépensée pour le rendre difficilement vivable, voire dangereux et donc dissuasif pour les personnes les plus pacifiques qui constituaient l'écrasante majorité du public. Ces Parisiens, jeunes ou moins jeunes, qui avaient eu pour certains d'entre eux des proches blessés, sévèrement traumatisés ou tués dans les massacres du 13 novembre et de janvier de l'année dernière, n'étaient plus du tout l'objet de la compassion hypocrite des gouvernants et des grands médias. À partir du moment où ils et elles s'opposaient à « la loi Travail et son monde », prenaient plaisir à occuper cet espace, qui avait été un lieu de recueillement quelques semaines plus tôt, pour débattre et écouter divers intervenants, créer diverses commissions et activités, ce n'étaient plus qu'une bande de « bobos » fainéants, n'ayant rien d'autre à faire que de bavasser toute la nuit ! La plupart des journalistes voulaient juste savoir si cela déboucherait sur un parti du genre de « Podemos ». Bien des stratèges militants ont commencé à se demander à quoi pourrait bien servir Nuit Debout. Car même sur le terrain de la lutte, chacun est prié à notre époque d'être productif, de prouver son utilité et d'indiquer son niveau de conscience et d'efficacité. On n'est pas là pour rigoler, rêver, partager ses idées dans certaines sphères militantes qui se veulent sérieuses. Quand on aime afficher avant tout ses divergences avec les autres, les concurrents, on trouve forcément bizarre et louche cette recherche du consensus et de la discussion dans un climat apaisé. Certains militants ont donc enveloppé dans un même dédain les quelques milliers de personnes qui ont pu être présents un soir ou un autre place de la République : « intellectuels bavards », « citoyennistes », « petits-bourgeois » (individualistes évidemment). À cette peu glorieuse énumération, nous pourrions aussi ajouter, si cela peut faire plaisir aux « militants-marxistes-sérieux-à-qui-on-ne-la-fait-pas », que dans un coin de la place de la République, il y avait aussi des amateurs de décibels vraiment pénibles, des ivrognes, des drogués et des personnes mal dans leur tête. C'est une autre facette réelle de Paris. Ainsi, le procès à charge de Nuit Debout a été vite bouclé par certains, au lieu de suivre avec intérêt l'évolution de cette expérience nouvelle à ciel ouvert et, pourquoi pas, d'y apporter leur contribution. Essayons de reprendre le dossier Nuit Debout de façon plus légère, sans basculer dans un dithyrambe qui n'a pas lieu d'être. Nous avons affaire à une expérience tâtonnée qui a ses faiblesses, ses ridicules, mais aussi ses belles échappées pour envisager un autre monde. Tout n'est pas sans intérêt dans les différentes commissions où des savoirs, des pratiques, des idées, des arguments ont été échangés. Il y a même eu des moments de grâce lorsque 300 jeunes musiciens professionnels et amateurs ont offert trois concerts à quelques milliers de personnes. Les militants sérieux m'objecteront peut-être que ce n'est pas en jouant la musique de Beethoven et de Dvorak qu'on va renforcer « le rapport de forces » contre le gouvernement et le MEDEF. Ce en quoi ils se tromperaient. Tout compte dans une lutte, le nombre de grévistes et de manifestants, mais aussi les moments qui rendent heureux et confiants dans l'avenir. Quoi qu'il en soit, Nuit Debout a pris racine en province, dans des villes et même dans des quartiers. Finalement, bien des prétendus petits bourgeois palabreurs (qui sont à l'occasion des travailleurs précaires) se sont retrouvés côte à côte avec les salariés dans les manifestations et les points de blocage. Si on prend au sérieux la notion de convergence des luttes, il faut admettre que, aussi limitée soit-elle, l'émergence des Nuits Debout aura été un réel apport au mouvement et qu'il aura peut-être des prolongements précieux. L'ÉTAT, BRAS ARMÉ DU CAPITAL Le gouvernement actuel démontre à quel point il est la pointe avancée et brutale au service du MEDEF et des entreprises du CAC 40. Son recours délibéré à la violence le rend odieux aux jeunes comme aux anciens, aux ouvriers comme aux lycéens. Le slogan qui a surgi, « Tout le monde déteste la police », enveloppe dans un même rejet les donneurs d'ordre du gouvernement. Car ce sont eux qui ont donné des consignes à la hiérarchie des préfets et de la police de frapper « sans retenue ». Hollande, Valls et Cazeneuve, le nouveau Jules Moch, espèrent encore casser le mouvement en autorisant les flics à piéger des manifestants dans des nasses, à crever un oeil, à arracher une main, à mettre un jeune entre la vie et la mort en lançant une grenade dans un groupe de manifestants pacifiques. C'est le management gouvernemental par la peur d'être arrêté, poursuivi en justice, blessé ou tué comme l'a été le jeune Rémi Fraisse. À présent les manifestants blessés, fichés et poursuivis se comptent par centaines. Hollande poursuit le job de Sarkozy et le Front National dévoile son jeu en estimant que la répression policière n'est pas au niveau souhaitable et en trouvant la loi El Khomri encore trop modérée à l'égard des salariés et des syndicalistes. Ces données policières et politiques sont éminemment instructives sur la nature de l'État et de ses rapports avec le capital. Il nous amène à considérer que le mouvement contre la loi Travail n'est pas seulement défensif. Il ne doit pas hésiter à se présenter comme un mouvement contre tous les partis en cheville avec les capitalistes : le Parti socialiste, la droite et le Front National. UN AVENIR DE RÉVOLUTIONS ET DE CONTRE-RÉVOLUTIONS EN EUROPE ? Le monde du capital déborde le cadre national et même le cadre européen. Le capital s'implante, se faufile et se désengage librement à l'échelle mondiale. C'est ce qui rend l'efficacité de nos luttes grévistes extrêmement problématiques. La situation en Europe s'avère de plus en plus dangereuse et intolérable pour toutes celles et tous ceux qui tentent de vivre de leur travail. De grandes révoltes sont en gestation. C'est donc dans le contexte européen au minimum qu'il nous faut penser le mouvement actuel en France. Trois éléments se combinent et se retrouvent pratiquement dans tous les pays européens : 1) les attaques tous azimuts contre les conditions d'existence des classes populaires ; 2) le recours de plus en plus systématique des États à la violence policière et à la restriction agressive, souvent légiférée, des libertés démocratiques ; 3) la poussée des tendances réactionnaires, racistes et souverainistes dont profitent les formations de la droite extrême ou de l'extrême droite comme le FN, et auquel il faut adjoindre la poussée non moins réactionnaire des salafistes et autres tendances du même type. Il est d'autant plus vital d'envisager la lutte contre le capitalisme, pas seulement dans le cadre national, car ce serait méconnaître la nature du capital, mais au-delà des frontières, en créant les rencontres, les liens et échanges indispensables pour coordonner les forces anticapitalistes. La colère dans les classes populaires et en particulier parmi les salariés se développe, comme le mouvement de grèves en Belgique l'atteste, ainsi que les mobilisations en Grèce qui ont repris de la vigueur après une phase de sidération devant le retournement de veste de Syriza. DES LECTURES POUR COMPRENDRE, LUTTER, S'ÉMANCIPER... Au cours de l'été 2014, une série de huit émissions remarquables de Charlotte Bienaimé ont été diffusées sur France Culture, « Nasawyat, les nouvelles féministes tunisiennes, égyptiennes, marocaines et algériennes », http://www.franceculture.fr/emission-nasawiyat. C'est à présent un livre de Charlotte Bienaimé qui porte la voix de ces jeunes femmes du monde arabe, « Féministes du monde arabe, Enquête sur une génération qui change le monde » (éd des Arènes). Ce sont des féministes de terrain et non des figures reconnues, qui sont de conditions sociales diverses, étudiantes, architectes, ouvrières, agricultrices ou poétesses. Musulmanes ou agnostiques, portant le voile ou non, elles sont toutes en lutte avec une énergie extraordinaire contre le patriarcat, pour l'égalité des sexes dans tous les domaines, pour la justice sociale, pour leur liberté personnelle et celle de tout le monde. Signalons que Charlotte Bienaimé a réalisé une autre série d'émissions au cours de l'été 2015 donnant la parole à d'autres jeunes femmes, cette fois en France. ******* Pour qui s'intéresse aux questions concernant la grève générale, le caractère politique ou économique d'une grève et les processus pouvant conduire à une révolution, nous recommandons la lecture du texte de la révolutionnaire Rosa Luxemburg, « Grèves de masse, parti et syndicats » (éd La Découverte, avec « Réforme sociale ou révolution ? »). Elle y analysait le rôle des grèves dans la révolution russe de 1905 et s'efforçait de dégager des enseignements utiles pour les militants de la social-démocratie allemande. On sait à quel point la direction de ce parti, déjà passablement bureaucratisé lors de la parution de ce texte, fut sourde aux analyses décapantes de Rosa Luxemburg. ******* Nous avons déjà eu l'occasion de vous présenter le livre de David Graeber, « Comme si nous étions déjà libres » (Lux, 2014), lors de sa parution. Beaucoup de gens ont entendu parler du mouvement « Occupy Wall Street » sans forcément l'avoir étudié dans ses diverses dimensions. L'anthropologue anarchiste, David Graeber, était bien placé pour écrire sur la question puisqu'il est un des principaux instigateurs de ce mouvement qui a ensuite essaimé dans 70 villes des États-Unis en prenant des formes parfois très différentes notamment à Oakland en Californie. On trouvera également des points de vue et de précieux témoignages dans « Occupy Wall Street ! » présenté par Jade Lindgaard (éd les Arènes, 2012). ******* Depuis le début de Nuit Debout à Paris, des allusions assez nombreuses ont été faites aux thèses de John Holloway. Il est amusant de constater que ceux qui en parlent ne l'ont pas lu ou l'ont lu superficiellement avec des a priori. Son livre « Crack Capitalism, 33 thèses contre le capital » (éd Libertalia, réédition en poche mars 2016) peut nourrir une réflexion sur la critique du travail et sur la convergence des luttes. Il analyse ce qui fait obstacle à la jonction des brèches dans et contre le système capitaliste, à savoir tout particulièrement le processus d'assignation de chacun à une identité donnée, à un rôle abstrait sur la scène sociale. Le processus d'identification qui est constamment généré par les rapports capitalistes, ce qui a pour effet de séparer, de créer des murs et parfois d'opposer les différents acteurs de la lutte anticapitaliste. Ainsi Holloway argumente contre les penseurs et les activistes qui réduisent les travailleurs à une seule dimension, leur personnage de classe, soit pour affirmer qu'ils sont le sujet unique de l'histoire, soit pour estimer qu'ils sont incapables de faire la révolution et qu'il faut trouver d'autres sujets de l'histoire dans les marges de la société. À ces derniers, John Holloway rétorque : « Quand l'immense majorité de la population est obligée de vendre sa force de travail pour survivre, toute conception de la révolution qui l'exclut sur la base de notre être unidimensionnel est hautement problématique. » (p. 202) Comme il est de coutume de vouloir réduire cet auteur à quelqu'un qui se contenterait de théoriser les petites expériences de sécession en marge de l'État et de la société marchande, je crois nécessaire de reproduire une autre citation tirée du même livre : « Alors, la classe ouvrière peut être considérée comme révolutionnaire dans la mesure où elle n'existe pas uniquement en elle-même en tant que classe ouvrière, mais aussi « contre-et-au-delà » d'elle-même en tant que classe ouvrière, et dans la mesure où elle réussit à se débarrasser de son masque de personnage, où elle lutte contre sa propre existence. » (p. 203) Cet argument ne fait à mon avis que développer la formulation de Karl Marx dans une de ses lettres : « La classe ouvrière est révolutionnaire ou elle n'est rien. » Il est donc souhaitable de lutter contre la loi Travail dans la perspective de « l'abolition du salariat » (expression du même Karl Marx), ou dit autrement, d'en finir avec le travail abstrait qui crée le capital et assure sa survie. IN SITU Depuis la dernière lettre, nous avons mis en ligne un article de Jacques Chastaing, « La poste de Rivesaltes (66) : une grève emblématique des luttes sociales en France. » Cette lutte se poursuit et il est toujours possible de la soutenir comme cela est indiqué à la fin de l'article. Bien fraternellement à toutes et à tous, José Chatroussat _______________________________________ Pour recevoir ou ne plus recevoir cette lettre, écrivez-nous: mél. : Culture.Revolution@free.fr http://culture.revolution.free.fr/ _______________________________________ |
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