Culture & Révolution

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Journal de notre bord

Lettre n°58 (20 juin 2005)

Bonsoir à toutes et à tous,

L'effet boomerang a fonctionné. Les électeurs des classes
populaires ont renvoyé le texte de la pseudo constitution
européenne dans la figure des nantis. Lesquels ne sont pas
contents du tout et semblent continuer à faire campagne pour
le oui avec une aigreur assez grotesque. Belle
démonstration. Un seul vote leur manque et tout est
déglingué ! Les grands États européens se battent comme des
chiffonniers. Ils s'accusent mutuellement d'égoïsme et il y
a de quoi, ils le sont tous. Le vernis de " l'entente
européenne " construite pendant cinquante ans n'était
vraiment pas épais. Les bourgeoisies impérialistes
européennes ne concevaient une avancée dans l'entente entre
elles que sur le dos des peuples, en leur imposant un cadre
anti-démocratique. Puisque leur coup a manqué, elles vont se
déchirer à belles dents, toujours sur le dos des classes
populaires.

De notre côté, celui des travailleurs de toute l'Europe et
de ceux en provenance des autres continents, il nous faut
développer nos liens et notre entente. Après avoir étudié
avec succès le fameux traité constitutionnel, il nous faut
prendre en charge les dossiers du chômage, des salaires, des
retraites et des services publics pour imposer nos
solutions, forcément radicalement, forcément par nos luttes.

Les bourgeois sont de plus en plus fâchés avec leur propre
démocratie et ils ne tiennent évidemment pas compte du
résultat du 29 juin pour céder quoi que ce soit. On s'y
attendait. On les voit à l'oeuvre quotidiennement se conduire
de plus en plus en dictateurs sur nos lieux de travail. Mais
nous, nous avons besoin de la démocratie pour y voir clair,
pour réfléchir collectivement, pour préparer nos luttes et
pour en garder le contrôle.

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Les inventeurs de maladie
Y a pas de souci !
Nouvelles de Tolstoï
Laurence Sterne
L'hiver sous la table
In situ
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LES INVENTEURS DE MALADIE
Nous sommes tous et toutes des malades en puissance. Nos
modernes docteurs Knock, l'industrie pharmaceutique et tous
les marchands de santé mènent leurs affaires en partant de
ce principe. Un livre extrêmement édifiants sur leurs
tactiques et stratégies vient de paraître en français,
" Les Inventeurs de maladies, Manoeuvres et manipulations
de l'industrie pharmaceutique " de Jörg Blech, journaliste
scientifique allemand (éditions Actes Sud). Cette enquête
très précise montre comment les industriels et les lobbys
procèdent concrètement pour faire des profits fabuleux dans
les grands pays occidentaux. A chaque molécule fabriquée
doit correspondre une maladie inventée de toutes pièces par
diverses voies publicitaires, médiatiques, et aussi la
complicité d'une partie du corps médical et des chercheurs.
Les phénomènes tels que la naissance ou le vieillissement
deviennent des prétextes à traitements médicaux rentables
mais inutiles voire nuisibles pour les patients. Les actes
gynécologiques coûteux et agressifs physiquement et
psychologiquement pour les femmes se multiplient. La
ménopause et l'andropause seraient des pathologies graves
auxquelles il ne faudrait pas se résigner selon les revues
impliquées dans le business de la santé.

On modifie les " normes " de taux de cholestérol ou de la
tension artérielle pour inciter plus de monde à prendre des
médicaments. On joue sur le ressort de la peur de tomber
malade pour pousser les gens à se soigner... préventivement !
La timidité est devenue une " phobie sociale " à soigner à
coup de gélules de même qu'un enfant agité est forcément à
traiter à la Ritaline.

Dans sa postface, Martin Winckler confirme la validité pour
la France des développements de Jörg Blech et relève des
exemples d'accointance entre les ministres de la santé et
l'industrie pharmaceutique. Une enquête à lire
absolument... pour rester en bonne santé et ne se soigner
qu'à bon escient.


Y A PAS DE SOUCI !
Parmi les expressions survenues dans notre vie quotidienne
ces derniers temps, l'une d'elle me plaît bien : " Y a pas
de souci ! " C'est apaisant. C'est tout de même mieux que "
ça me gave " ou " ça me saoule " que l'on entendait à
longueur de journée il n'y a pas si longtemps. " Y a pas de
souci... " peut être considéré comme une phrase concise
résumant plus de 25 siècles de sagesse orientale et
occidentale. Il n'est peut-être pas nécessaire de tester cet
adage dans diverses situations désagréables avec les flics,
les chefs, les banquiers et autres fâcheux dépourvus
d'humour. Avec eux, ce serait plutôt a priori " rien que des
soucis ".


NOUVELLES DE TOLSTOÏ
La proposition de lecture qui va suivre devrait attirer tout
le monde, ceux qui n'ont jamais rien lu de Léon Tolstoï et
ceux qui connaissent déjà certaines de ses oeuvres marquantes
et étonnamment vivantes, " Anna Karénine ", " Guerre et Paix
", " Hadji Mourat ", " Maître et serviteur " ou
" Poulikouchka ". Quatre courtes nouvelles du grand écrivain
russe viennent d'être rééditées en collection folio (2
euros, 83 pages) sous le titre " Le réveillon du jeune tsar
et autres contes ". La dernière édition en France datant de
1934, ce sera une découverte pour beaucoup. La nouvelle la
plus remarquable est la dernière, " Ainsi meurt l'amour ".
Elle date de 1903. Deux ans plus tard la première grande
révolution du 20e siècle éclatait en Russie. Le
rapprochement n'est pas fortuit. La reconnaissance
universelle dont Tolstoï fut l'objet de son vivant n'a
jamais émoussé son indignation contre la barbarie tsariste.


LAURENCE STERNE
Profitons de l'été pour reconstituer nos réserves de bonne
humeur et d'imagination, autant que se faire ce peut.
L'écrivain anglais Laurence Sterne (1713-1768) peut tout à
fait nous y aider. Le grand oeuvre de Sterne, " Vie et
opinions de Tristram Shandy " (éditions Tristram, traduction
Guy Jouvet) est un récit à la première personne qu'une
dizaine d'adjectifs seront bien insuffisants et impropres à
définir : inventif, cocasse, délirant, digressif, satirique,
facétieux, subtil, vertigineux, labyrinthique et
irrévérencieux. Pour Diderot, c'était le livre " le plus
fou, le plus sage et le plus gai ". Il en fit son miel
lorsqu'il entreprit d'écrire " Jacques le fataliste et son
maître ". Au reste Laurence Sterne dont les revenus
provenaient d'une charge de pasteur anglican fort peu
orthodoxe, avait une grande estime pour Diderot et
D'Holbach.

Quand on est sensible au charme de Sterne, on est
inévitablement gagné par la folie ludique d'en savoir plus
sur son cas et sur les interprétations de son oeuvre. Les
amateurs liront donc le " dossier " qui le concerne dans le
numéro de janvier dernier de " La Nouvelle Revue Française
". Il comprend en particulier des lettres de Sterne dont
l'une, " autobiographique ", est encore plus incontournable,
si cela est possible, que les autres. Un homme qui a eu le
toupet d'écrire : " Nous avons tous assez de force pour
supporter les maux d'autrui " devait être de bonne
compagnie.


L'HIVER SOUS LA TABLE
Nous vous en avons parlé il y un an, lorsque la pièce " Un
hiver sous la table " de Roland Topor fut joué au Théâtre de
l'Atelier dans une mise en scène de Zabou Breitman. Heureuse
surprise, ce spectacle a été filmé par la réalisatrice en
vue d'un DVD réjouissant à tous égards. C'est l'histoire
d'un plombier polonais... excusez-moi, je m'égare... C'est
l'histoire d'un cordonnier immigré qui pourrait être
polonais ou bulgare ou roumain mais qui très certainement
vient de l'Est. Ce Monsieur Dragomir est littéralement un
sous-locataire. Il habite et travaille sous la table d'une
jeune traductrice fauchée, Mademoiselle Michalon.

Vous avez aimé " Quand la mer monte " de Yolande Moreau ? Eh
bien je parie que vous allez aimer " Un hiver sous la table ".
C'est une histoire qui n'a rien à voir avec l'autre mais
qui vous fera tout plein du bien comme l'autre. Pourquoi ?
Parce que il y a de l'humour, de la poésie, des beaux
sentiments et que toute cette alchimie de rêve léger et de
réalité pesante est portée par des acteurs qui nous
enchantent : Isabelle Carré, Dominique Pinon, Guilaine
Londez, Eric Prat et Liviu Badiu. En bonus, on appréciera
particulièrement les commentaires en coulisses de Zabou
Breitman.


IN SITU
Depuis la dernière lettre, comme promis, nous avons mis en
ligne des points de vue sur le film " The Take " d'Avi Lewis
et Naomi Klein et sur le roman d'Elfriede Jelinek " Les
Amantes ". Vous trouverez également sur notre site un point
de vue sur un recueil de nouvelles de Sherman Alexie, " Dix
petits Indiens ".

Bien fraternellement à toutes et à tous

Samuel Holder 
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