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Journal de notre bord

Lettre n°52 (le 5 janvier 2005)

Bonsoir à toutes et à tous,

L'énormité de la catastrophe en Asie du Sud a suscité un
élan de générosité internationale de la part de gens ayant
pour la plupart des ressources modestes. Il y a là le signe
que des millions de personnes ne sont nullement égoïstes ou
individualistes comme le ressassent trop de commentateurs
superficiels ou intéressés. Ces millions de personnes
aspirent plus ou moins consciemment à un autre ordre social,
respectueux de la vie, des besoins et de la dignité de tous
les habitants de la planète. On se sent membres de la
communauté humaine et on voudrait agir efficacement contre
les conséquences d'une telle calamité.

Malheureusement les États et les grandes entreprises font
obstacles, avec leur incompétence, leur concurrence stupide
y compris dans ce domaine et leur esbroufe médiatique. Leurs
promesses d'aides cachent mal leur détermination à ne pas
dépenser grand-chose pour les victimes. Une de leurs
priorités reste de faire la guerre en Irak, en Afrique, en
Palestine et de préparer d'autres guerres. Leurs dépenses
militaires pléthoriques sont en constante expansion. Leur
raison d'être, à ces États et à ces grandes entreprises
capitalistes, est de faire des profits. D'où leur impératif
implacable de garder la maîtrise des ressources et de
l'exploitation du travail humain à l'échelle mondiale.

Rien n'est soluble tant que ces gros rouages monstrueux du
système resteront en place. Il faut réfléchir dès maintenant
aux moyens à mettre en oeuvre pour les détruire. Il faut leur
imposer des concessions bien sûr, comme celle d'annuler la
dette des pays appauvris par eux. Mais il faut surtout
songer à détruire la machine infernale capitaliste qui
conduit l'humanité à sa perte et dont nous avons déjà des
exemples sous les yeux en Asie, en Irak, au Darfour ou au
Congo.

Pas question de rester dans l'apathie et la déploration
comme de nombreux commentateurs nous y incitent. En ce début
d'année 2005 notre colère est intacte contre ce système,
celle qui pousse à la réflexion et à l'action. Nous faisons
nôtre cette exclamation de Rosa Luxemburg concluant son
article intitulée " Dans l'asile de nuit " de janvier 1912 :
" A bas l'infâme régime social qui engendre de pareilles
horreurs ! "
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Business de la compassion
Comment sauver l'essentiel
Contre une infamie
Du trop de réalité
Mémoires d'un esclave
In situ
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BUSINESS DE LA COMPASSION
Sous l'Ancien régime, les nobles et les bourgeois donnaient
quelques miettes de leurs revenus aux pauvres. Ou plus
exactement ils donnaient à l'Église pour qu'elle donne une
partie de ces miettes aux pauvres, en se servant au passage.
C'était une sorte d'assurance contre les révoltes
populaires. Ayant versé leur obole, ils avaient acheté à peu
de frais la paix sociale et l'image de gens compatissants.

Notre époque n'est guère différente sous ce rapport. Pernod-
Ricard, BNP Paribas, LVMH, Michelin ou Total promettent de
verser des sommes à des organisations caritatives pour des
raisons équivalentes. On vend son image pour faire de bonnes
affaires. La promesse de dons doit se traduire par un retour
sur investissement. Chefs d'État ou grands patrons, ils
jouent aux humanistes pour pouvoir poursuivre toutes sortes
d'infamies contre la nature et contre l'humanité en toute
impunité.


COMMENT SAUVER L'ESSENTIEL
Lu dans le quotidien La Tribune du 4 janvier : " Michèle
Alliot-Marie, ministre de la Défense et Bernard Kouchner, au
nom du PS, plaident pour une taxe exceptionnelle sur le
capital. " De peur que tout le Capital soit menacé un jour,
il leur semble prudent de lâcher un peu de lest. Mais sur ce
terrain ils viennent d'être débordés sur leur gauche par
Bill Gates et le chanteur Bono dans une tribune parue dans
" Le Monde " du 4 janvier et intitulée audacieusement : " Pour
une année de lutte contre la misère et le sida ". Dans un
élan carrément altermondialiste, ils proposent
" l'annulation totale " (sic) de la dette des pays pauvres.
Après cela, Microsoft devrait recevoir le label de
l'entreprise la plus " citoyenne " du monde. D'autant que le
même Bill Gates a passé un accord avec l'UNESCO qui devrait
lui permettre de placer encore plus facilement sa
marchandise aux dépens de ses concurrents. Le capitalisme à
visage humain est une escroquerie qui trompe certains et qui
rapporte à d'autres.

À propos :
http://www.csdptt.org/article317.html
http://portal.unesco.org/fr/ev.php-URL_ID=23643&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html
http://portal.unesco.org/ci/fr/ev.php-URL_ID=12034&URL_DO=DO_TOPIC&URL_SECTION=201.html


CONTRE UNE INFAMIE
Nous avons déjà eu l'occasion de vous parler de Kamel Belkadi,
ex-salarié de Daewoo-Orion, condamné à trois ans de prison
(dont 18 mois fermes) et 30 000 euros d'amende pour
l'incendie de l'usine qu'il n'a pas commis. Kamel Belkadi a
fait appel de ce jugement qui doit être examiné le 13
janvier prochain. Il y a donc urgence à apporter un soutien
massif à ce travailleur et à dénoncer l'acharnement odieux à
son encontre. Pour prendre connaissance des faits et
apporter son soutien personnel, il faut se connecter sur :
http://nancy-luttes.net/soutien.kamel.daewoo/


DU TROP DE RÉALITÉ
Il existe des livres qui vous secouent et vous entraînent
plus loin. On ne se sent pas obligé pour autant d'être
constamment en accord avec leurs auteurs. Mais on va
jusqu'au bout et on en sort revigoré. Tel est le cas du
livre d'Annie Le Brun, " Du trop de réalité " paru en 2000.
Il vient d'être réédité en collection de poche folio essais.
Pour Annie Le Brun, révolte et poésie ne peuvent être
dissociées. Elle a repris son élan critique à partir de
questions fondamentales comme celles-ci : " Pourquoi n'y
aurait-il plus de jeunes gens assez passionnés pour déserter
les perspectives balisées qu'on veut leur faire prendre pour
la vie ? Pourquoi n'y aurait-il plus d'êtres assez
déterminés pour s'opposer par tous les moyens au système de
crétinisation dans lequel l'époque puise sa force
consensuelle ? "

Elle s'insurge contre " la misère de ce temps " où le
virtuel prend la place de l'imaginaire, où les grands
révoltés d'autrefois de la poésie, de l'art et de la société
sont exhibés, répertoriés et banalisés dans les musées, les
essais et les manuels. Certains font leur délice de Rimbaud,
de Jarry ou de Van Gogh, du surréalisme, des situationnistes
ou de l'anarchisme, comme autant de mets spirituels réservés
à une élite, un fond de commerce ou un objet d'étude qui ne
tire pas à conséquence. Les entreprises sont multiples qui
convergent pour étouffer la charge subversive des grandes
créations poétiques, artistiques ou philosophiques. Un
climat s'est instauré pour diluer, supprimer, décourager
tout sens critique. Annie Le Brun démasque cela avec énergie
et acuité, dans une langue belle et exigeante.


MÉMOIRES D'UN ESCLAVE
" Toute l'histoire des progrès de la liberté humaine
démontre que chacune des concessions qui ont été faites à
ses nobles revendications ont été conquises de haute lutte.
Là où il n'y a pas de lutte, il n'y a pas de progrès. Ceux
qui professent vouloir la liberté mais refusent l'activisme
sont des gens qui veulent la récolte sans le labour de la
terre, la pluie sans le tonnerre et les éclairs : ils
voudraient l'océan, mais sans le terrible grondement de
toutes ses eaux ". Ces propos qui n'ont rien perdu de leur
force ont été écrits par Frédérick Douglass, un ancien
esclave noir américain qui s'évada définitivement en 1837 et
mena énergiquement la lutte pour l'abolition de l'esclavage
ainsi que pour l'égalité entre les hommes et les femmes. Il
faut lire le récit de cet homme remarquable qui vient d'être
réédité aux éditions Lux, " Mémoires d'un esclave " (173 pages)
avec quelques textes en complément par rapport à
l'ancienne édition chez Maspero. Dans l'un d'eux extrait
d'un discours prononcé en 1852, Frédérick Douglass explique
avec une grande force polémique ce que signifie " votre 4 Juillet ",
la fête nationale, pour un esclave.

Plus de détails sur l'ouvrage :
http://www.luxediteur.com/lux/memoiredesameriques/memoiresdunesclave/
Sur Lux Éditeur :
http://www.luxediteur.com/lux/apropos.html


IN SITU
Depuis la dernière lettre, nous avons mis en ligne un texte
sur la Révolution française et l'esclavage à Saint-Domingue
dans la rubrique en question.
http://culture.revolution.free.fr/en_question/


Nous vous souhaitons chaleureusement une bonne année et bien
davantage. Nous souhaitons rompre ensemble avec l'état
étriqué et pénible de survie dans lequel le système social
actuel nous pétrifie. Nous vous souhaitons, comme à nous-
mêmes, une bonne vie, c'est-à-dire une vie pleine de sens,
sans concessions.


Bien fraternellement à toutes et à tous

Samuel Holder 
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  mèl : Culture.Revolution@free.fr
 http://culture.revolution.free.fr/
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