Culture & Révolution

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Journal de notre bord

Lettre n°45 (le 13 mai 2004)

Bonsoir à toutes et à tous

Bienvenue aux nouveaux abonnés à cette lettre et merci à nos
correspondants pour leurs suggestions, critiques et
encouragements.

Lorsqu'on regarde le monde par la lucarne des informations
télévisées, le dégoût nous saisit. Il n'en va guère mieux en
nous plongeant dans la lecture des quotidiens. Images de la
guerre en Irak, de la guerre en Palestine, de la guerre en
Tchétchénie... Et puis il y a les guerres sans images, qui font
moins d'audimat, mais n'en sont pas moins ignobles, au
Soudan, en Afghanistan, en Colombie... Et enfin toutes ces
situations de guerres ouvertes ou larvées en Haïti, en
Birmanie, dans les campagnes brésiliennes où des paysans
sans terre se font assassiner.

Peut-on, sans vergogne, affirmer que la France n'est pas
impliquée dans une guerre ? Non. L'État français et les
vendeurs d'armes français soufflent sur les braises dans
bien des pays et font des affaires avec le sang des peuples.
L'État français fait la guerre en Côte d'Ivoire pour
défendre les profits des groupes capitalistes implantés dans
ce pays. A quand une manifestation contre l'intervention
militaire française en Afrique et contre le soutien de la
France à une série de régimes crapuleux au Maghreb et en
Afrique noire ? De même, manifester massivement contre la
guerre de Bush et Blair contre le peuple irakien, la guerre
de Sharon contre le peuple palestinien et la guerre de
Poutine contre le peuple tchétchène reste à l'ordre du jour.
Bref manifester et agir pour le retrait de toutes les armées
impérialistes et coloniales et pour leur dissolution.
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George d'Arabie à Disneyland
La longue marche sur des oeufs
Dans le grand monde
Pour en finir avec le capitalisme
Métissage
Le sacre du printemps
Un ami, un vrai
Le mammouth vous salue bien
Rien que des bons films
Chanteuses rares
In situ
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GEORGE D'ARABIE À DISNEYLAND
On attend avec impatience de voir le nouveau documentaire de
Michael Moore, " Fahrenheit 911 " présenté à Cannes. Il
s'est appuyé sur l'enquête de Craig Unger, " Maison Bush,
Maison Saoud " mettant en évidence les liens financiers
entre le clan Bush et la famille royale saoudienne, un
business qui dure depuis vingt ans. Dans son livre " Tous
aux abris ! " (La Découverte), Moore mettait déjà la
pression (hilarante) sur celui qu'il appelle George d'Arabie
en lui posant des questions sur ses relations avec le clan
Saoud et sur celles qu'il semble également entretenir avec
certains membres du clan Ben Laden. Tout cela n'est pas du
goût du groupe Disney qui, après s'être engagé à distribuer
le film de Michael Moore par sa firme Miramax, a ensuite
refusé de le faire. George Picsou Bush aurait-il aussi des
intérêts dans Disneyland ?


LA LONGUE MARCHE SUR DES OEUFS
La crise du gouvernement français, de l'exécutif élyséen et
des partis de droite ne cesse de s'approfondir et de
rebondir, entraînant même de la circonspection, des états
d'âme et des critiques au sein de l'appareil d'État. Ça
pourrait s'intituler " polka dans un champ de tir " ou " les
tontons et godillots flingueurs ". Ces gens au pouvoir se
tirent dans les pattes à cadence de plus en plus accélérée.
Tiendront-ils jusqu'en 2007 ? Il y a lieu d'en douter. Une
longue traversée de trois ans où ils devront marcher sur des
oeufs semble au-dessus de leurs capacités. Car les chômeurs
et les salariés s'amusent de leur déroute électorale, se
régalent de leurs reculs sur les dossiers les concernant et
leur préparent tranquillement, silencieusement, une bonne
explosion sociale qui les mettra hors jeu. A l'évidence
Chirac devrait partir ou dissoudre l'Assemblée. Ce qui ne
serait pas du goût des leaders du Parti socialiste. La
patate brûlante d'une grève générale ou d'une grande
explosion sociale, le PS la laisserait volontiers à la
droite. Imaginez François Hollande, président ou premier
ministre, clamant de sa voix perchée : " il faut savoir
terminer une grève ", ça le ferait pas. Bernard Thibault de
la CGT un peu plus ; mais il n'est pas certain qu'il ferait
le poids pour contenir et saboter une grande mobilisation du
monde du travail. Le paysage politique est donc plutôt
sombre pour la bourgeoisie française. Tous les piliers de
leur ordre sont ébranlés, dévalués, voire carrément perçus
comme illégitimes.

Pour approfondir notre réflexion sur la situation française
actuelle, la lecture du dernier numéro 29 de la revue
" Carré rouge " est très stimulante. De même sur la campagne
des européennes et sur l'évolution de la situation au
Brésil.


DANS LE GRAND MONDE
Il est difficile d'apprécier l'ampleur et le nombre des
luttes ouvrières qui se produisent dans le monde. Peu de
gens savent par exemple que des travailleurs en Irak ont
fait grève et certains ont occupé leurs usines récemment
dans la ville de Nasiriyah malgré la répression. (voir
http://www.solidarite-irak.fr.fm/)
[ndlr du 02/08/2008 : utilisez plutôt http://www.solidariteirak.org/]



Les mobilisations en Corée du Sud demeurent considérables.
Pour en savoir plus sur le mouvement ouvrier dans ce pays,
il faut lire dans la revue Inprecor (voir site
http://www.inprecor.org/), l'article de Wang Youngsu
intitulé " Relance des luttes ouvrières ".


POUR EN FINIR AVEC LE CAPITALISME
Un groupe de militants et de travailleurs de Nancy impliqués
dans les luttes ont choisi une belle date, le 1er mai, pour
lancer un appel intitulé " Rassemblons-nous pour en finir
avec le capitalisme ! ". C'est avec plaisir que nous
relayons cet appel et que nous vous invitons à le lire, à le
discuter, à le faire connaître et à le signer si vous vous
retrouvez dans les idées qui y sont exprimées. Nous
souhaitons que cet appel rencontre un intérêt et qu'il
favorise un regroupement des forces " pour en finir avec le
capitalisme ". Consulter le site
http://nancy-luttes.net/Rezo-antiK/


MÉTISSAGE
" Enfants d'ici venus d'ailleurs " de Marie Rose Moro est un
livre passionnant (collection Pluriel Hachette
Littératures). L'auteure est psychiatre d'enfants et
d'adolescents à l'hôpital Avicenne, à Bobigny. Elle dirige
la revue transculturelle L'Autre et son action s'appuie sur
les travaux de l'ethnopsychanalyse initiés par Georges
Devereux.

Ce livre traite des souffrances des enfants (et de leurs
parents) venus d'autres pays en France (Maghreb, Afrique
noire, Asie, Turquie, etc). Issus de cultures multiples, ces
enfants sont censés s'intégrer, en tant qu'individu, à la
seule et unique culture française occidentale. Quelques
récits de vie illustrent la difficulté de leur situation.
Marie Rose Moro montre dans quelle perspective scientifique
et humaine travaille l'équipe d'Avicenne. La compréhension
et l'écoute de ces exilés en souffrance exigent de
s'interroger sur sa propre subjectivité et de faire tomber
quelques oeillères. L'équipe met parfois en jeu de nombreux
intervenants : parents collatéraux de l'enfant, interprète,
psychiatre, enseignant, travailleurs sociaux, juge, famille
d'accueil.

Ce livre ne s'adresse pas qu'aux spécialistes ou aux
passionnés de psychologie. Il ouvre les yeux et le coeur de
ceux qui veulent réellement vivre et agir dans une société
métissée, en acceptant les autres comme alter ego, comme
" des compagnons de voyage ", en pratiquant " la
décolonisation de soi-même " et l'art de la rencontre.


LE SACRE DU PRINTEMPS
Dans les rééditions en poche, nous avons repéré celle de
" La Danse sacrale " du grand écrivain cubain Alejo Carpentier
(folio). Le titre original étant " Consagracion de la
primavera ", il aurait sans doute été plus judicieux de le
traduire en français par le Sacre du Printemps. Les
hispanophones nous donneront leur avis. Quoiqu'il en soit,
tous les romans, nouvelles et articles d'Alejo Carpentier
méritent d'être lus. Pour ceux qui ne connaissent pas cet
écrivain, la lecture du " Siècle des Lumières " qui se passe
aux Caraïbes pendant la Révolution française les
passionnera. Il a écrit " La Danse sacrale " à la fin de sa
vie en 1980. Ce roman foisonnant et baroque nous conduit de
l'Espagne révolutionnaire de 1936 à la tentative d'invasion
de Cuba orchestrée par les États-Unis à la baie des Cochons
en 1961.


UN AMI NÉCESSAIRE
Un homme amoureux de la même femme et dans la longue durée,
n'est-ce pas étrange et charmant ? Tel fut Diderot avec
Sophie Volland qui, du reste, n'était pas son épouse
légitime qu'il supportait mal. De la main de Sophie Volland,
on ne connaît que son testament. A la suite de son legs aux
pauvres, cette femme remarquable écrit : " Je donne et lègue
à Monsieur Diderot sept petits volumes des Essais de
Montaigne, reliés en maroquin rouge, plus une bague que
j'appelle ma pauline. " Diderot mourut cinq mois après
Sophie et on peut aisément supposer que ce fut de chagrin et
d'une immense fatigue en considération de tous les combats
soutenus, de son travail phénoménal sur l'Encyclopédie et de
l'amertume que laisse une amitié perdue, celle de Jean-
Jacques Rousseau.

Mais nous, gens du 21e siècle, nous avons un ami sûr,
attachant, constamment surprenant, par sa drôlerie, sa
mélancolie, sa tendresse, ses enthousiasmes et le feu
d'artifice de ses idées, en la personne de Denis Diderot. Il
suffit pour cela de nous plonger dans sa correspondance avec
Sophie Volland. (édition intégrale chez Bouquins/Laffont et
sélection de lettres en folio).


LE MAMMOUTH VOUS SALUE BIEN
Le mammouth revient en force dans l'actualité. Les visiteurs
de l'exposition " Au temps des mammouths " au Museum
d'histoire naturelle à Paris en reviennent enchantés. Pour
affronter ces grosses bêtes dans de bonnes conditions, la
lecture du dossier de Pour la Science, " La vie au temps des
mammouths " est hautement recommandable. Difficile de faire
plus complet et plus vivant sur tout ce qui concerne cet
animal, son environnement et son importance pour les hommes.
Tout est bon à consommer dans ce dossier. Citons par exemple
l'article de Brigitte et Gilles Delluc sur " le style des
mammouths dans l'art paléolithique " ou " Ce que disent les
poils de mammouths " de Patricia Pineau. La tige pilaire
d'un mammouth laineux livre des informations sur ce qu'il a
mangé dix jours auparavant et sur une éventuelle maladie ou
un changement climatique. D'où cette remarque amusante :
" Au passage, le crâne rasé de certains sportifs s'explique :
un examen de leur tige pilaire révélerait sans difficulté la
prise de certaines substances illicites. "


RIEN QUE DES BONS FILMS
Il y a actuellement une abondance de films réussis nous
permettant de comprendre l'existence et les sentiments des
gens des classes populaires dans divers pays, Bosnie,
Israël, Argentine, Algérie, Japon, États-Unis, France...
Avec nos ami(e)s, nous vous recommandons " Au feu " de Pjer
Zalica, " Le fils d'Elias " de Daniel Burman, " Broken Wings
" de Nir Bergman, " Viva Laldjérie " de Nadir Moknèche,
" Shara " de Noami Kawase, " Du Mali au Mississipi " de Martin
Scorcese et " Les Sucriers de Colleville " d'Ariane Doublet.
A noter également l'édition en DVD de " Wanda " dont nous
vous avons déjà entretenu l'été dernier, avec de précieux
boni (un bonus, des boni ; une rosa, des rosae selon Jacques
Brel).


CHANTEUSES RARES
Tout à coup une chanteuse de jazz ou plus ou moins
apparentée au jazz devient célèbre. Le bouche à oreille ou
le bulldozer de la promotion sont passés par là. Ce qui
n'enlève rien et n'apporte rien à un talent réel en voie de
développement ou d'amenuisement. Nous voudrions attirer
l'attention sur deux chanteuses qui ne seront probablement
jamais atteintes par les agréments ni par les désagréments
de la célébrité : Sathima Bea Benjamin et Suzanne Abbuehl.

La première est une chanteuse sud-africaine blanche qui
poursuit sa carrière commencée en 1959, dans la plus grande
discrétion. Tentez votre chance pour dénicher son CD
intitulé " A Morning in Paris " enregistré en 1963 avec sur
certaines plages au piano Abdullah Ibrahim (Dollar Brand)
qui fut son mari et sur d'autres Billy Strayhorn et un
certain Duke Ellington. Le violoniste Svend Asmussen jouant
exclusivement en pizzicato ajoute beaucoup au charme de
cette séance dont les bandes faillirent disparaître.

S'il n'est pas déjà épuisé, tentez de trouver l'unique CD de
la chanteuse suisse Suzanne Abbuehl, " April " (2001 ECM
Records, prise de son superbe, comme toujours sur ce label).
Plus on l'écoute, plus on l'aime. La regrettée chanteuse
Jeanne Lee et la compositrice Carla Bley ont beaucoup
contribué à l'épanouissement de l'art raffiné de Suzanne
Abbuehl. Elle chante notamment des poèmes du poète américain
E. E. Cummings et sa version de 'Round Midnight est une
merveille.


IN SITU
Depuis notre dernière lettre, nous avons mis en ligne deux
points de vue contrastés sur le film " Deux frères " de Jean-
Jacques Annaud, un sur " Le fils d'Elias ", sur
" Les Sucriers de Colleville ", sur " Du Mali au Mississipi " et
sur " Au feu ! ". La rubrique " en question " s'est enrichie
de trois articles, l'un sur le livre de Serge Halimi,
" Le Grand bond en arrière ", un autre à propos de celui de
Franck Magloire, " Ouvrière ", et un troisième sur des
questions à propos de la génétique. Nous avons créé une
nouvelle rubrique consacrée à la science-fiction avec un
texte introductif.


Bien fraternellement à toutes et à tous

Samuel Holder

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