Culture & Révolution

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Journal de notre bord

Lettre n°32 (le 22 avril 2003)

Bonsoir à toutes et à tous

" Quand j'entends le mot revolver, je sors ma culture "
disait Francis Blanche. Les mots missiles, tanks,
mitrailleuses, porte-avions et croiseurs nous font le même
effet. Affûtons les armes de la critique et prenons un bon
bain de culture pour nous maintenir le moral à flot. Car la
guerre en Irak n'est pas terminée, il y en a une qui
continue à faire rage en Palestine et d'autres qui se
préparent. À cela s'ajoute dans tous les pays, la guerre
économique, politique et policière contre les classes
populaires qui prend un tour aigu, acharné de la part des
classes possédantes. Le joli mois de mai sera très chaud
socialement si des millions de salariés parviennent à
conjuguer leurs forces pour la défense de leurs intérêts,
qui sont ceux de toute la société.

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Guerre en Irak
Nietzsche et Einstein
La recherche scientifique en péril
Toumaï
Voyage italien
Harlem
À voir
Saga rock n roll
Un brésilien victorieux
Jonquilles
In situ
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GUERRE EN IRAK
La guerre en Irak a provoqué le besoin d'analyser les causes
de cette guerre et de comprendre plus en profondeur la façon
dont fonctionne aujourd'hui le système capitaliste mondial.
Le numéro 26 de mars-avril de la revue " Convergences
révolutionnaires " (voir nos liens) a consacré un dossier
fourni à cette guerre intitulé : " Les États-Unis en guerre :
contre l'Irak, contre les peuples, contre leur peuple. "

Le prochain numéro de " Carré Rouge " (n°25 paraissant cette
semaine) comportera une bonne vingtaine d'analyses sur la
situation mondiale en provenance de militants et de
chercheurs marxistes de différents pays. Nous recommandons
vivement la lecture de ce numéro qui devrait provoquer des
débats fructueux pour comprendre et combattre le système
impérialiste.


NIETZSCHE ET EINSTEIN
La meilleure façon de se faire une idée fausse de Nietzsche,
comme de bien d'autres philosophes, c'est d'en avoir entendu
parler sans l'avoir lu. Etre d'accord ou non avec lui, n'est
pas le problème. Cet homme est stimulant et c'est ce qui
nous importe. Prenons par exemple les paragraphes 633-634-
635 de " Humain, trop humain ". Nietzsche y parle de la
recherche et des méthodes scientifiques : " Dans l'ensemble,
les méthodes scientifiques sont une conquête de la recherche
pour le moins aussi considérable que n'importe quel autre
résultat : c'est en effet sur l'entente de la méthode que
repose l'esprit scientifique, et tous les résultats des
sciences ne pourraient, si ces méthodes venaient à se
perdre, empêcher un nouveau triomphe de la superstition et
de l'absurdité. " Nietzsche s'inscrit dans la continuité du
Siècle des Lumières et met en valeur " la lutte personnelle
des penseurs " qui a permis l'émergence des méthodes
scientifiques, avec ce que cela suppose d'extrême prudence
et de modestie intellectuelle. Il s'insurge contre la " foi "
et contre " la myope conviction " qui prétendent dominer
ou se substituer à la recherche scientifique. Nietzsche est
un de nos grands contemporains au même titre qu'Albert
Einstein qui écrivait : " La recherche scientifique est
florissante quand elle est pratiquée pour elle-même avec
indépendance d'esprit. "


LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE EN PÉRIL
Il ressort de tous ces propos que la réduction des crédits
pour la recherche par Chirac et Raffarin a un caractère
obscurantiste et criminel à plusieurs titres. La recherche
scientifique demande des moyens matériels et humains, du
temps et la préservation de " l'indépendance d'esprit " dont
parlait Einstein. Il y a là une profonde incompatibilité
avec la recherche du profit rapide par les groupes
industriels et la recherche d'économies par l'État pour
gonfler les équipements de l'armée et de la police. De toute
évidence de nombreux jeunes ne se tourneront pas vers la
recherche scientifique si le débouché qui s'offrira à eux
après leurs études sera de s'inscrire à l'ANPE. Belle
manoeuvre que de réduire les crédits de la recherche au
moment où l'épidémie de pneumonie atypique mortelle prend
des proportions inquiétantes à l'échelle planétaire !

Non seulement des programmes de recherche vitaux pour la
santé publique sont en péril mais la recherche en
archéologie est gravement compromise. Les membres du
gouvernement piétinent allègrement le passé, le présent et
le futur de la société. Inutile de s'étendre sur les dégâts
qu'ils provoquent dans les secteurs de l'éducation, de la
santé, des retraites et de l'emploi. Un mouvement social
préventif dans le style Mai 68 serait des plus salutaire
pour empêcher ces gens-là de nuire et pour reprendre tous
ces dossiers en mains sur de bonnes bases.


TOUMAÏ
Connaissez-vous Sahelanthropus tchadensis ? Il est plus
connu sous le nom de Toumaï. Est-ce un hominidé ou un
homininé ? Pour tenter d'en savoir plus sur ce personnage
énigmatique dont le crâne et sa mandibule ont été découverts
en juillet 2001, il faut lire les articles de Pour la
Science à paraître en mai sur " les débuts de la lignée
humaine ". Mais il faut aussi lire " Toumaï L'aventure
humaine " d'Alain Beauvilain (La Table Ronde, mars 2003).
L'auteur est géographe et a accompli de nombreuses missions
scientifiques au Tchad, dont celle qui a permis la
découverte de Toumaï par Ahounta Djimdoumalbaye, le 19
juillet 2001 à 7 heures du matin. C'est le récit d'aventures
enthousiasmantes mais aussi extrêmement pénibles, notamment
à cause de tempêtes de sable et à cause de températures
pouvant atteindre 60°C.

En juillet dernier, nous avions été intrigués par le fait
que douze mois s'était écoulés entre la découverte effective
et son annonce officielle. Le livre apporte quelques
éclaircissements sur les intrigues pénibles qui ont été
provoqués par cette découverte. Alain Beauvilain n'a pas
voulu que l'équipe des quatre hommes dont trois Tchadiens
qui ont découvert Toumaï, sombre dans l'oubli et l'anonymat.
Et pourtant un des articles récents du dossier de Pour la
Science continue à affirmer que " M. Brunet découvrit son
fossile au Tchad " alors que ce paléontologue se trouvait en
France au moment où Toumaï fut découvert !


VOYAGE ITALIEN
Cela faisait près de cinquante ans que l'ensemble des
aventures et observations de Goethe en Italie brillaient par
leur absence en langue française, tandis que tout le monde
pouvait savourer les narrations de Montaigne et de Stendhal
au sud des Alpes (à condition d'en avoir envie, bien sûr).
Donc merci et bravo à Jean Lacoste qui vient d'établir une
édition complète du " Voyage en Italie " de Goethe (éditions
Bartillat). Goethe était curieux de tout : art, géologie,
coutumes locales... Il dessine en plein air au risque d'être
pris pour un espion ! Il se métamorphose au cours de ses
pérégrinations de Vérone à Palerme, en passant par Florence,
Rome et Naples. " Le voyageur venu du Nord croit qu'il vient
à Rome pour y trouver un supplément à sa propre existence,
pour combler ses lacunes ; mais il ne prend que
progressivement conscience, non sans un grand malaise, de ce
qu'il doit changer entièrement de point de vue et commencer
à nouveaux frais. " Il ne faut pas manquer sa description du
carnaval de Rome ni sa rencontre avec une belle Milanaise
qui, malheureusement pour lui, tournera court mais lui
laissera un souvenir ému.


HARLEM
Les éditions de la Découverte viennent d'avoir l'excellente
idée de rééditer " L'ingénu de Harlem " de l'écrivain noir
Langston Hughes. Ce recueil de nouvelles a été publié à New
York pour la première fois en 1961. Il y a là matière à
passer de bonnes heures de lecture en compagnie du
personnage principal de ces aventures urbaines, Jess B.
Semple dit Simple. Ce travailleur noir, pilier de bar et
noctambule impénitent aborde tous les grands et petits
sujets de l'existence, en philosophe cocasse et lucide du
peuple de Harlem. Langston Hughes avait beaucoup
d'admiration pour Maupassant mais son personnage de Simple a
aussi quelques affinités avec celui du Neveu de Rameau de
Diderot.


À VOIR
Une de nos lectrices nous recommande une exposition
intitulée " j'aime pas la culture ", et c'est avec plaisir
que nous reproduisons une partie de son message :

" Une exposition belge à Paris avec un titre pareil, ça
dérange les cultureux conservateurs ! À voir pour ceux qui
pensent que la culture est tout public, qu'elle peut être
ludique et qu'il est bon de la descendre de son piédestal.
Les arts au XXè siècle : littérature, musique classique,
cinéma, arts de la scène, musique Pop rock, arts plastiques.
Un Boulevard du Temps sur lequel on chemine et dont les
décors changent avec les décennies. On y trouve les moments
historiques qui ont changé la face du monde comme les
inventions qui ont changé la vie de tous les jours.
Ça m'a beaucoup plu ainsi qu'à ma petite soeur de 10 ans.
C'est au 68, quai de la Seine. 75019 Paris. Métro Riquet.
C'est un peu cher, mais pour ne pas être conservateur il
faut savoir se détacher des institutions : pas de
subventions pour cette exposition. C'est 9 euros l'entrée
avec des tarifs réduits à 7 et 5 euros. Enfin pour une
balade agréable et instructive de 3 heures dans le XXè
siècle, ça vaut vraiment le coup. Au fait, elle dure
jusqu'au 15 juillet 2003. "


SAGA ROCK N ROLL
Notre équipe a bien aimé le film " The Sea " de l'islandais
Baltasar Kormàkur qui n'a pas plu à la plupart des
critiques.

Dans une petite ville islandaise, le patron de la principale
usine de conditionnement de poissons décide de passer la
main et convoque pour ce faire toute sa famille, y compris
un des fils censé faire des études sérieuses en France. Ca
se passe mal. Ca tient un peu des Atrides, du Roi Lear et de
certains romans de Balzac où les questions d'héritage font
exploser toutes les frustrations. Mais nous sommes ici dans
le contexte actuel des problèmes de quotas de pêche et de
concurrence capitaliste risquant de se solder par le
licenciement du personnel de l'usine. Un cocktail violent
traité en même temps avec un humour grinçant. D'après le
réalisateur, plaisanter de ce qui est insupportable est une
tradition islandaise dont on trouve des exemples dans
certaines sagas.


UN BRÉSILIEN VICTORIEUX
Ce Brésilien est tout à fait admirable. Avec sa silhouette
trapue, il n'est plus tout jeune. Il a une barbe grisonnante
et une expression bienveillante sur le visage. Ses mains ont
des capacités expressives stupéfiantes. Il a obtenu une "
victoire " de la musique, ce qui est du reste sans
importance. Vous l'avez peut-être reconnu, il s'agit de
Nelson Freire, un des plus grands pianistes vivants qui
vient d'enregistrer les Etudes de Chopin et la sonate n°3 du
même compositeur (CD Decca).


JONQUILLES
La chanteuse et pianiste Nina Simone qui vient de
disparaître disposait d'une force expressive qui donnera
toujours le frisson. Ceux qui ne la connaissait pas feront
une découverte impressionnante. Il est heureux que de jeunes
artistes s'inscrivent dans le sillage de Nina Simone, de
Louis Armstrong, de Billie Holiday ou de Sarah Vaughan. Tel
est le cas de la chanteuse Malia, née en Afrique au Malawi
et arrivée à Londres à l'âge de quinze ans. Elle se joue des
barrières de styles et se promène avec aisance entre blues,
jazz, disco, musique électronique, rap et bossa nova. Son
album printanier s'intitule " yellow daffodils " (CD Rêve
Orange. http://www.malia-online.com/ ). Une musique
chaleureuse avec des arrangements et des interventions
séduisantes d'André Manoukian, Manu Codga, Marcello
Giulianni, Marc Herbetta, Mobile in Motion, etc.


IN SITU
Depuis la dernière lettre, nous avons mis en ligne sur notre
site deux articles dans la rubrique " en question " : l'un
sur le livre du sociologue Alain Tarrius sur " La
mondialisation par en bas, Les nouveaux nomades de
l'économie souterraine " et l'autre inspiré par l'actualité
de la guerre en Irak " Le système impérialiste en crise ".
Au rayon romanesque, vous trouverez des points de vue sur le
roman du grand romancier portugais Ferreira de Castro
" Forêt vierge " et sur celui d'Arundhati Roy, " Le Dieu des
petits riens ". Ajoutons que cette auteure indienne a publié
dans le " Guardian " un texte bien senti sur la guerre en
Irak qui a été reproduit dans " Le Monde " du 9 avril
dernier (" Bush, obscène mécanicien de l'empire "). Sur le
même sujet, ne manquez pas la lecture d'un texte du
romancier américain Jim Harrison paru dans le " Nouvel
Observateur " du 10 avril sous le titre " Mon Amérique " :
humour désespéré et déjanté, un régal.


Bien fraternellement à toutes et à tous

Samuel Holder

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