On entend un peu partout le chiffre « deux ». C'est sans doute le bon, mais
tout dépend ce qu'on comptabilise. Par « deux » beaucoup entendent la guerre de 1991
et celle de 2003. Ce serait donc oublier la première vraie guerre du Golfe, celle qui a opposé
l'Irak à l'Iran, entre 1980 et 1988. Il est vrai qu'à l'époque Saddam
Hussein était dans le camp occidental. Mais pour le peuple irakien, ce fut quand même une vraie
guerre : entre 100 000 et 200 000 morts, près de 400 000 blessés ! Quant à celle de
1991, elle a duré jusqu'aux événements militaires du printemps 2003 : il s'agit
bien d'une seule et même guerre. Le peuple Irakien subit la guerre depuis 12 ans !
Car sinon comment comptabiliser, par exemple, la campagne militaire de décembre 1998, dite
« Renard du désert », qui fit des dizaines de morts ? Mais c'est plusieurs fois par
semaine que pendant des années, les avions américains, britanniques (mais aussi
français, dans les premières années après 1991) ont bombardé l'Irak.
Dans les huit premiers mois de 1999, par exemple, plus de 1 000 missiles ont été tirés
par 200 avions de combat et 19 navires de guerre.
Il y a plusieurs manières de faire la guerre quand on est une grande puissance comme les
États-Unis. On peut envoyer ses propres soldats, comme en Irak actuellement, ou bien payer des
mercenaires, comme en Afghanistan, après 1979, ou encore étrangler un peuple par l'embargo.
Ce n'est pas nouveau : dans les années 1950, les États-Unis pouvaient payer des
mercenaires, comme dans le coup d'État au Guatemala en 1954 (raconté par Miguel Angel
Asturias dans son recueil de nouvelles Week-end au Guatemala), ou bien envoyer leurs GI directement
au Viêt-Nam, à partir de 1957, ou bien encore tenter d'étrangler Cuba
économiquement. L'impérialisme a plus d'un moyen pour écraser les peuples !
Le 6 août 1990, l'ONU, à travers sa résolution 661, a imposé
à l'Irak un boycott commercial (en particulier évidemment sur le pétrole), financier
et militaire de l'Irak. Puis elle a lancé en 1991 une coalition armée de 37 États
contre l'Irak. Après le retrait des troupes irakiennes hors du Koweït, elle a imposé
la résolution 986 du 25 octobre 1996, dite « pétrole contre nourriture ». Ce
programme avait certes un volet humanitaire, mais ce volet devait être financé par l'Irak.
Et le personnel de l'ONU en Irak a été payé par l'argent du pays, ce qui
était une première. Avec des salaires minimum de 11 000 euros par mois.
L'Irak a donc vécu une situation de pillage déguisé. Les enfants en ont
été les premières victimes. En 1999, l'UNICEF donnait des chiffres qui traduisaient
une réalité qui n'a pu qu'empirer par la suite : la mortalité des enfants de
moins de cinq ans en Irak était de 56 pour 1000 dans le milieu des années 1980. Elle est
passée à 131 pour 1000 en 1999, ce qui représente la mort de 500 000 enfants. En 2003,
avant la nouvelle campagne militaire, un quart des enfants de moins de cinq ans souffraient de
malnutrition.
Dans les années 1970, l'État providence irakien assurait des soins
gratuits et l'école pour tous et toutes. C'est en 1972 que Saddam Hussein a nationalisé
les compagnies pétrolières.
Depuis 1991 et l'embargo, l'État s'est désengagé et a privatisé au
maximum. L'appareil d'État a été divisé en morceaux, chaque clan de la
famille de Saddam Hussein s'en réservant un.
Des secteurs ont dû se débrouiller par eux-mêmes. En 1997, le gouvernement décide
que les hôpitaux doivent s'autofinancer, puis vient le tour de nombreuses entreprises
d'État. Bientôt il n'y a plus de budget officiel. En quelques années le nombre de
fonctionnaires dans la Santé est divisé par trois. L'Etat ne paie quasiment plus ses
fonctionnaires. Et quand ceux-ci reçoivent un salaire il ne dépasse pas 5 dollars par mois.
Pendant ces années d'embargo, la population ne peut pas s'offrir les produits
relativement abondants et diversifiés qu'on trouve sur les marchés de Bagdad. Seuls les
riches n'ont pas besoin des distributions des rations alimentaires de l'ONU. 60 % de la population
est totalement dépendante des distributions organisées par les autorités. Plus de la
moitié de la population est au chômage et à part dans les couches les plus riches, tout
le monde a revendu tout ou partie de ses biens pour pouvoir manger. Parfois il faut choisir entre la
nourriture et les médicaments.
Beaucoup de techniciens, auparavant venus du Pakistan et des Philippines, sont partis. Or ils avaient un
grand rôle dans l'économie, en particulier l'entretien. Ainsi les hôpitaux sont de
plus en plus mal entretenus. Par exemple, des machines à rayons X sont déréglées
et envoient leur radiation dans toutes les directions.
La misère est bien là. Il n'y avait pas de cas de choléra en 1991 ; on en a
compté 560 en 1999-2000. L'hygiène s'est dégradée, du fait de
l'absence de complet traitement des eaux. Dans le quartier pauvre d'al-Doha de Bagdad, la pollution
endémique, les remontées d'égouts du fait des coupures
d'électricité, entraînent des maladies catastrophiques. On ne peut pas même
contrôler les aliments, puisque l'ONU interdit l'utilisation de certains produits
chimiques.
Les « cols blancs », ingénieurs et professeurs se transforment en petits
commerçants. La délinquance en Irak se développe.
L'analphabétisme gagne du terrain, alors que, selon les Nations Unies, un tiers des enfants de 6
ans ne vont plus à l'école. 85 % des écoles sont à réhabiliter ou
à reconstruire. Les professeurs ne reçoivent pas un salaire supérieur à 6 000
dinars par moins (3 euros).
Dans les familles, les Irakiens, face à l'adversité, serrent les rangs et
développent les solidarités, à tel point qu'on voit moins de mendiants à
Bagdad qu'à Paris ! Mais l'autre conséquence c'est un cloisonnement des femmes
(alors que dans les années 1970-1980, les femmes irakiennes avaient une grande indépendance).
En 2001, le gouvernement impose la fin de la mixité dans les écoles. La société
retrouve des mœurs de clan : crimes d'honneurs, polygamie... Et bien sûr beaucoup
d'Irakiens prennent le chemin de l'exil : 4 millions d'entre eux vivent à
l'étranger. Beaucoup sont sans papier en Europe.
Ceux qui restent essaient de survivre par la débrouillardise. Le système lui-même
détourne l'embargo imposé par les Nations Unies. Et il y a de quoi ! De fait, l'Irak a
reçu le feu vert pour exporter une quantité de pétrole valant 56 milliards de dollars,
mais il n'a reçu que 53 % de cette somme.
Pendant toute la période après 1991, Saddam Hussein a cherché à
reconstruire une économie parallèle. En 1999, alors que, signe des temps, son Ministre des
finances est devenu vice-premier ministre, les affaires à Bagdad ont commencé à bien se
développer. Des restaurants chics pour la minorité bourgeoise se sont répandus. Ce qui a
permis à Saddam Hussein de dire dans un discours en janvier 2000 que l'Irak réussissait
à vivre malgré l'embargo. Et bien sûr l'Irak dont il parle c'est la
minorité riche de la population.
Cet enrichissement provient du trafic de pétrole hors application de la résolution 986. Le
pétrole de contrebande est d'abord exporté par le port de Bassorah, grâce à la
complicité des autorités iraniennes. Après le 11 septembre 2001, l'Iran choisit de
se rapprocher des États-Unis, et l'Irak doit faire sortir son pétrole de contrebande
d'une autre manière. Le trafic prend alors la direction de la Turquie, par camions. Saddam Hussein
prélève deux taxes, à la raffinerie d'abord, puis au check-point juste avant
d'entrer au Kurdistan. Le passage par la Turquie au point de contrôle Ibrahim Khalil, se fait le
plus naturellement du monde devant les inspecteurs de l'ONU, qui laissent les camions passer. Mais les
États-Unis sont plus sourcilleux, à un moment où ils se préparent à la
guerre, et le pétrole passe par l'oléoduc irako-syrien, réouvert en 2000. Il
s'agit de quantités impressionnantes : 200 000 barils par jour. Trafic qui bien sûr enrichit
au passage la camarilla au pouvoir à Damas. Après le discours du 29 janvier 2002, où
George Bush classe l'Irak dans les pays de l'« axe du mal », le marché clandestin
continue de plus belle : Saddam Hussein s'enrichit pour lui et son armée. À l'automne
2002, les exportations illégales s'élèvent à 350 000 barils par jour.
C'est grâce au pétrole qu'une mince couche de très gros privilégiés
est apparue. Ces gens vivent dans les beaux quartiers de Bagdad. Ils ont des hôpitaux à eux,
alimentés correctement en médicament, obtenus par le marché noir. Ils envoient leurs
enfants à l'Université Saddam, qui dépend directement du Président.
À côté du marché noir du pétrole, il y a aussi celui des armes. Ici, il ne
s'agit pas d'autre chose que de petite mécanique. Un proverbe circule : « Les Irakiens
sont capables de transformer une 2CV en véhicule blindé ». Il est vrai que l'embargo
a poussé les Irakiens à la débrouillardise, mais ce proverbe sert surtout à faire
peur aux occidentaux, et peut être utilisé dans des buts guerriers. Néanmoins, les
Irakiens, plus exactement trois hommes, Abdel Melah Howeich, ministre de l'Industrialisation militaire,
Saddam Hussein et son fils Quoussai, ont fait venir des pièces détachées d'armes
depuis la Serbie, la Corée du nord, l'Ukraine, la Chine...
Les gros commerçants jouent un rôle dans cette classe riche irakienne. Ils possèdent des
dollars, ce qui est avantageux avec un taux qui est passé de 1 dollar pour 3,3 dinars en 1990,
à 1 dollar pour 2200 dinars.
Avant sa destruction par les troupes anglo-américaines, l'armée irakienne
n'avait déjà pas beaucoup de poids militaire. Pourtant, il fut un temps où on la
présentait comme la quatrième armée du monde. Mais Saddam Hussein n'avait pas les
moyens de se construire une authentique armée nationale.
Il n'en avait pas tout d'abord les moyens matériels (on a trouvé dans l'arsenal
irakien des missiles achetés à la France et construits... en 1979). Il n'en avait pas non
plus les moyens politiques. De fait, en instaurant une dictature sans faille sur son peuple, il ne pouvait
pas à la fois mener une guerre contre son peuple et s'appuyer sur lui pour forger une armée
solide. Dans des prisons comme celle de Abu Ghraib on torturait sans relâche les opposants. Et
était opposant quiconque critiquait le rais. Les tortionnaires de Saddam Hussein s'en prenaient
aux femmes et aux enfants des opposants. De très nombreuses femmes furent assassinées au nom du
retour à la foi. Les prostituées furent exécutées sur la place publique.
Les personnalités gênantes disparurent une à une. Mohammed Sadeq al-Sadr était une
personnalité gênante : ce haut dignitaire chiite cherchait à rapprocher les
communautés chiites et sunnites. Il fut exécuté en février 1999. Cette
opération fut menée non par quelques sicaires obscurs, mais directement par un des fils de
Saddam Hussein, Qoussaï.
Saddam Hussein s'arrangea régulièrement pour que de tels assassinats fussent commis par des
proches. En 1979-1980 déjà, son demi-frère, Barzan, organisa le recrutement d'agents
doubles pour éliminer les opposants à l'étranger. Pour cette opération, il
eut toute liberté en matière financière.
Saddam Hussein s'appuya aussi sur les chefs de tribus, ainsi que sur le parti Baas, tout en utilisant des
méthodes policières modernes. Cela lui permit d'échapper à une quinzaine
d'attentats.
Mais cet art du camouflage ne suffit pas à constituer ni même à définir un
appareil d'Etat solide. Les forces de répression étaient chargées d'opprimer le
peuple. Avant même l'arrivée des troupes américaines sur le sol irakien, Saddam
Hussein s'adressa à l'armée en lui demandant de prendre garde aux
« traîtres ». Et dans les villes comme Mossoul (avec une partie kurde dans la
population) et comme Bassorah (avec sa forte population chiite), les habitants craignaient, avant le
début des hostilités, des règlements de compte au sien de la population, entre
communautés ethniques ou religieuses.
Ce n'est donc pas sur cette base sociale si fragile que Saddam Hussein s'appuya. Son pouvoir, il le
construisit méthodiquement, en achetant la soumission de quelques hommes, peu nombreux, mais
totalement dévoués. Il y eut d'abord ses proches gardes du corps, l'unité
al-Mourafi-kin, formée d'anciens mendiants raflés dans les rues de Bagdad alors qu'ils
n'étaient encore que des adolescents. Saddam Hussein les nourrit, les éleva, et les coupa
de la société.
Dans un cercle un peu plus éloigné, il y avait le Service de Sécurité
spéciale, doté d'un armement moderne. La moindre recrue était mieux payée
qu'un général de l'armée régulière. Ces hommes, au nombre de 8
à 10 000, furent commandés par Hussein Kamel, gendre de Saddam Hussein, jusqu'à sa
fuite en Jordanie en 1995, puis par Quoussaï.
À côté de la Sécurité spéciale, on trouvait la garde nationale
spéciale (20 000 hommes), ainsi que la milice « Fedayin de Saddam » (30 000 à
40 000 hommes). Le chef de ces derniers était l'autre fils de Saddam Hussein, Oudaï.
Ces hommes n'avaient rien à voir avec une armée régulière. Il s'agissait
plutôt d'une milice quasiment privée. L'armée régulière, elle,
était d'abord composée de pauvres et de chiites (même si tous les chiites ne sont pas
pauvres). Officiellement, c'était une armée de conscription, mais les jeunes hommes riches
pouvaient se faire réformer moyennant finance. Pour 1,5 million de dinars (750 dollars), le service
militaire pouvait passer de un an et demi (trois ans pour ceux qui n'avaient pas de diplôme)
à deux mois.
Evidemment, après l'écrasement, en 1991, les révoltes chiites et
kurdes par l'armée irakienne et avec la complicité passive de l'ONU, on ne pouvait pas
s'attendre en 2003 à une révolte populaire au moment de la chute imminente de la dictature.
L'armée a même plutôt d'abord cherché à résister aux
armées anglo-américaines.
L'attitude prudente de la population dans les quartiers pauvres vient aussi de sa méfiance pour
avoir subi depuis des années les pires situations du fait de la dictature, des guerres, de l'ONU,
et de la diplomatie militarisée américaine. Et cet endurcissement a pu paradoxalement servir
pendant un temps le régime oppresseur de Saddam Hussein.
Dommanget, militant du mouvement ouvrier français au XXième siècle, écrivait
à propos de la classe ouvrière parisienne qui avait résisté aux Prussiens en
1871 : « Il y a dans la classe ouvrière un héroïsme admirable, incomparable,
dont la bourgeoisie a toujours largement su tirer parti puisqu'elle a fait du prolétariat des
usines et des champs le prolétariat des conquêtes et des batailles. » (La
Commune et les Communards).
De plus, avoir toutes les raisons de se révolter ne conduit pas nécessairement à la
révolte. Les événements évoluent selon les rapports de force, militaires et
sociaux, mais l'inverse est vrai aussi. Qu'on relise ainsi les écrits de Rosa Luxembourg sur
l'année 1904 en Russie. En cette période de guerre contre le Japon, les grèves
générales avaient quasiment disparu et le tsarisme écrasa aussi bien le mouvement
ouvrier que les libéraux bourgeois. Dans un deuxième temps, le mouvement ouvrier reprit
l'offensive, puis, face à la décadence de l'État tsariste et aux défaites
de l'armée, les libéraux démocrates remontèrent sur l'avant-scène
politique, reléguant la classe ouvrière dans l'ombre pour une période de six mois.
En décembre, les cosaques au service du tsar reprirent du poil de la bête, mais
s'opposèrent très vite à la grève générale des ouvriers. Ce qui
conduit Rosa Luxembourg à tirer cette conclusion : « L'absolutisme ne peut pas
être renversé à n'importe quel moment, où il ne faudrait qu'une dose
suffisante ‘d'effort' et de ‘persévérance'. » Bien sûr
Rosa Luxembourg, dans cette brochure Grève générale, parti et syndicat, parle
de la situation russe en 1904 et non de la situation irakienne en 2003, mais on peut néanmoins trouver
des raisonnements utiles pour aujourd'hui.
Maintenant que le régime de Saddam Hussein est tombé, la situation en Irak reste pleine de
risques et d'enjeux pour les classes populaires, ultra majoritaires. C'est fortes de
l'expérience de la dictature, des guerres, de l'embargo de l'ONU, qu'elles pourraient
bien prendre l'offensive, pour leur propre compte cette fois, mais cela n'est pas
inéluctable.
Les forces sociales réactionnaires sont toujours vivaces en Irak, même si elles apparaissent
sous un jour nouveau. La « démocratie » dans ses diverses versions, sous la coupe des
fonctionnaires de l'ONU, de l'armée américaine, du clergé chiite, des anciens
tortionnaires du parti Baas reconvertis, ou sous une formule compilant tout cela en fonction des conflits
entre les couches sociales et leurs intérêts parfois divergents, pourrait prendre le devant de
la scène et reléguer la population dans les ghettos miséreux des grandes villes.
Après avoir enduré la guerre et l'oppression, les travailleurs et les pauvres d'Irak ne
doivent pas se forger de nouvelles chaînes en soutenant les barbus (comme les travailleurs iraniens en
1979-1980 avaient été conduits à soutenir l'ayatollah Khomeyni) ou les nationalistes
prétendument modernistes mais liés au grand Capital international. Sinon, ils connaîtront
encore l'oppression, le recul social et culturel inévitablement, la guerre civile plus ou moins
larvée très certainement.
L'avenir de l'Irak ne doit pas revenir aux « Irakiens », mais aux travailleurs, avec ou
sans emploi, irakiens, ainsi qu'à tous les pauvres du pays, quelles que soient leur
nationalité. La démocratie que les travailleurs d'Irak peuvent construire c'est une
démocratie laïque, pour et par les travailleurs, tournée contre tous les
impérialismes et vers les autres peuples pauvres de la région.
N.B. Sur la société irakienne avant la chute du régime de Saddam
Hussein, nous conseillons le livre (récemment paru mais déjà daté !) de Georges
Malbrunot et Christian Chesnot Saddam Hussein, portrait total, Éditions 1, 2003, 272
pages
Avril 2003
André Lepic
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