Quand la mer monte...

De Yolande Moreau et Gilles Porte

Film franco-belge, avec Yolande Moreau, Wim Willaert
2004, 93 minutes

Le thème de ce film original et délicat est inépuisable : la vie du théâtre confrontée au théâtre de la vie. Ici les deux vies se regardent l'une l'autre, parfois en souriant, parfois en riant et bien souvent en ayant la gorge serrée.

Irène (Yolande Moreau) joue chaque soir un spectacle dans une salle différente du nord de la France. Seule en scène, avec son masque en carton pâte comique et horrifiant, et son cabas d'où dépasse un poireau, elle profère âprement : « Sale affaire, j'ai trempé dans un crime... » Plongée dans une solitude consternante et cocasse, le personnage d'Irène cherche « l'âme soeur » dans le public, éventuellement avec une lampe de poche. Un spectateur devient donc chaque soir « son poussin » censé lui faire connaître « les délices de l'amour ». L'heureux élu doit monter sur scène, décontracté ou confus. C'est ce qui arrive à Dries, au grand amusement de ses copains. Dries, avec sa bonne bouille de ch'ti sans arrière pensée, ne s'attendait pas à celle-là ! Devenir pour un soir un acteur et en plus se retrouver sur une photo polaroïd avec « la vedette ». Une personne pas fière avec qui il va faire la causette et prendre un pot.

Pour un peu, Dries abandonnerait son boulot sur les marchés pour partir en tournée avec Irène, entre Béthune et Valenciennes, entre canal, zones industrielles, dunes et champ de houblon. Après tout, lui aussi est un artiste puisqu'il porte un « géant » nommé Totor, une de ces grandes marionnettes qu'on sort pour certaines fêtes dans le Nord comme la Saint Nicolas. Les fanfares, les gaufres, les frites, la bière et la franche rigolade y sont de rigueur.

Irène était seule dans sa loge, seule dans sa chambre d'hôtel et seule sur les routes avec sa valise et sa chaise pour le spectacle. Chaque soir elle téléphonait à son mari pour dire d'une voix fatiguée « ça s'est bien passé » et elle reportait à plus tard le choix de la couleur des carreaux pour la salle de bains. Fini la routine. Dries s'attache à Irène, dont le coeur tangue. Va-t-on assister à une « Sale affaire » ? Non, jolie rencontre, mélancolique, douce et drôle.

Le 8 novembre 2004

Samuel Holder

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