L'écrivain américain William Styron s'est inspiré
d'épisodes de sa propre vie pour écrire ces « trois histoires de
jeunesse ».
Dans la première nouvelle Z comme zéro, le jeune Paul est âgé
de vingt ans. Il est engagé dans les Marines et se retrouve au large d'Okinawa, en avril
1945. Comme tous ses compagnons, il se croit « gonflé à bloc », avide de
tuer un maximum de Japonais. Mais le bruit court que leur compagnie ne fera pas partie de
l'offensive principale. Quelle gloire attendre d'une attaque amphibie de diversion ? Paul
et son ami Stiles se sentent frustrés et cherchent un réconfort auprès du
lieutenant-colonel Halloran pour qui tous les jeunots ont une véritable
vénération. Vu de près, le modèle de l'officier valeureux laisse
à désirer. Il est gorgé de whisky et de haine des Japonais. Il raconte de
longues histoires à périr d'ennui et classe tous les penseurs des siècles
passés en « bolchos ou anti-bolchos ».
Quant à Paul, derrière sa façade de brave qui veut en découdre, il se
révèlera être un jeune désemparé et nostalgique du pays
natal.
Les deux autres récits se passent avant la Deuxième guerre dans un village
côtier de Virginie. Shadrach est l'histoire d'un vieux Noir qui a
été vendu dans sa jeunesse comme esclave en Alabama. On suit parallèlement
l'histoire d'une famille blanche, imbue de ses origines et sombrant dans la pauvreté
et la déchéance la plus totale.
Dans Un matin de Virginie, Paul a treize ans. Il livre des journaux dès cinq heures
du matin pour une paie dérisoire. Il est le témoin écuré des
humiliations que fait subir son patron à son serviteur noir.
En prenant pour matière quelques-uns de ses souvenirs plutôt douloureux, Styron
évoque avec sensibilité la mutation des Etats-Unis entre 1935 et 1945, telle que
l'ont vécue quelques Américains pas tranquilles du tout.
Le 3 février 2001
Samuel Holder