Uzak

Film turc de Nuri Bilge Ceylan

Avec Muzaffer Özdemir (Mahmut) et Mehmet Emin Toprak (Yussuf)
2002, 110 minutes

Le jeune Yussuf quitte son village pour tenter de trouver du travail à Istanbul. Il n’a pas le choix. L’usine dans laquelle il travaillait ainsi que son père les a licenciés. Mille personnes se sont retrouvées sur le carreau. Yussuf a l’adresse de Mahmut, un cousin installé à Istanbul et originaire du même village que lui. Mahmut, lui, gagne plutôt bien sa vie comme photographe attitré d’une entreprise de carrelages ! Au demeurant c’est un métier assez peu exaltant pour un homme qui rêvait d’être un grand cinéaste. Certes il a un appartement, une voiture et un ordinateur connecté sur internet. Mais il est en plein désarroi depuis son divorce avec sa femme qu’il aime toujours sans se l’avouer.

Mahmut a accepté d’héberger son cousin campagnard sans excès d’enthousiasme, le temps qu’il trouve un emploi. Les deux hommes cohabitent mais communiquent fort peu, chacun étant muré dans sa solitude et englué dans ses soucis. Yussuf court les docks et les officines pour se faire embaucher. Efforts vains auxquels succèdent des errances qui lui font découvrir la ville ou lui faire suivre une silhouette féminine. Chacun se débrouille avec sa tristesse dans une ville maussade qui devient superbe quand elle se couvre de neige.

Chaque plan de ce film a été mûrement pensé et offre matière à information sur les relations humaines, à admiration pour la beauté de certaines images ou à réflexion sur sa propre vie, au travers de ce que ressentent aujourd’hui des habitants d’Istanbul frappés par la crise économique et ses effets déliquescents sur leur vie sentimentale. Le rythme est lent, méditatif, comme chez le cinéaste japonais Ozu ou le cinéaste italien Antonioni. On ressent l’ennui d’existences sans perspectives, sans s’ennuyer une seule seconde. Le réalisateur sait aussi nous surprendre et introduire des touches d’humour doux amer. On suit avec passion la vie de ces deux hommes, chargée l’une comme l’autre de tensions sourdes, de frustrations sexuelles et sentimentales, de malentendus nourris par les différences sociales.

Le 22 janvier 2004

Samuel Holder

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