La Verrerie

de Mènis Koumandarèas

Roman traduit du grec par Marcel Durand
Éditions Le Serpent à plumes, collection Motifs (juillet 2003)
211 pages

Ce roman a été publié pour la première fois en 1975 à Athènes après la chute de la dictature des Colonels. Il a connu un succès durable en Grèce. L'auteur l'a écrit entre 1971 et 1974, années de peur et de corruption, anesthésiant la plupart des volontés. Ces années-là sont évoquées en demi-teintes. L'art de Koumandarèas consiste à être au plus près de ses personnages, avec fraîcheur et simplicité. De cette histoire écrite en phrases courtes émane en douceur un humour, un désespoir discret et un désenchantement qui est contrebalancé par l'énergie et l'appétit de vivre de Bèba Tandès, l'héroïne principale.

La jeune Bèba, ancienne étudiante communiste pleine d'enthousiasme s'est ensuite retrouvée mariée à Vlassis, un gentil étudiant introverti, issu d'une famille de droite. Les rêves d'une vie politique et personnelle intense s'estompent au fur et à mesure que Bèba doit affronter tout un lot d'épreuves et de difficultés épuisantes. Elle a fait une fausse couche et n'a pu avoir d'enfant par la suite. Elle a du reprendre la gestion du magasin paternel de luminaires et autres objets en verre, une verrerie située dans un quartier pauvre et pollué d'Athènes, près de l'usine à gaz. L'entreprise est chroniquement au bord de la faillite. Bèba doit sans arrêt aller secouer les puces des mauvais payeurs.

Vlassis assure consciencieusement et passivement la comptabilité. Les deux associés Vassos et Spyros, l'un obèse et l'autre sec, rivalisent d'incompétence et de bonne volonté. Ils sont admiratifs et toujours étonnés devant la silhouette et la chevelure noire de leur patronne surgissant de sa Skoda. Ils sont deux incarnations de la médiocrité, avec ce que ce qualificatif peut avoir de touchant et non de péjoratif. L'un a été militaire en Corée et l'autre a occupé divers emplois improbables aux États-Unis. Le quatuor se retrouve pendant longtemps à La petite friture le samedi soir, pour refaire le monde et évoquer leur passé plus ou moins aventureux.

Mais Vlassis, le mari de Bèba, s'avère au fil des années de plus en plus dépressif. Bèba tente de conjurer son désastre intime et d'empêcher la déconfiture de la verrerie par divers moyens.

Si le lecteur n'a pas rencontré précisément les quatre principaux protagonistes de ce roman dans les rues d'Athènes, c'est tout comme lorsqu'il aura refermé ce livre attachant.

Le 30 janvier 2005

Samuel Holder

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