En publiant ce premier roman en 1997, Arundhati Roy a obtenu le succès auprès
de nombreux lecteurs et auprès de la critique avec le Booker Prize. Cette femme née en 1959 en
Assam écrit aussi des scénarios de films. Sa mère est originaire du Kerala au sud-ouest
de l'Inde et son père est bengali.
Arundhati Roy est une militante engagée dans le mouvement altermondialiste. Elle combat aussi bien la
politique réactionnaire de l'administration Bush que Ben Laden « ce vieil acolyte de la
CIA ». Elle lutte contre les essais nucléaires indiens et pakistanais, et le
fondamentalisme hindouiste. Elle dénonce toutes les formes d'oppressions en Inde, celles
provoquées par la sauvagerie du capitalisme et celles liées à une société
rurale cloisonnées en castes, clans et cultes.
Elle a choisi de rester vivre à Delhi et elle a déclaré au Monde (21
décembre 2002) : « Je ne peux pas aller m'acheter une vie ailleurs. Ce n'est pas
parce que j'adore l'Inde, mais je fais partie de la biodiversité, avec les oiseaux ou les
poissons. Et puis, là où je vis, il est important d'être un hooligan, un citoyen qui
dérange. Il faut se servir de sa liberté, sinon on vous la reprendra ! »
Arundhati Roy ne pratique pas la langue de bois politicienne. Elle déclare : « Un roman,
c'est sacré, je ne veux pas l'utiliser à d'autres fins, c'est un morceau de
philosophie, un moyen de réfléchir sur le monde. »
« Le Dieu des petits riens » le confirme. Ce roman a un ton juste, clair, féroce
jusqu'à l'horreur. On ne peut le lâcher jusqu'à la dernière page. Le
récit se situe dans un bourg du Kerala près de la ville de Cochin dans les années
soixante. Il entremêle le destin de nombreux personnages. Sans y prendre garde, par des chemins
complexes comme ceux de cette nature et de cette société, nous entrons en empathie avec
eux.
Deux jumeaux de huit ans, Rahel et Estha sont confrontés à un fait atroce et contraints de
choisir entre la vérité et le mensonge censé sauver leur mère. Cet
événement va les séparer. Ils vont quitter l'Inde puis y revenir et chaque fois,
s'y retrouver eux et leur maison : l'ombre du grand-père entomologiste, la grand-mère
dirigeant une fabrique de « confitures », l'oncle coureur de femmes et communiste
d'opérette, la grand-tante amoureuse mystique d'un prêtre irlandais à la foi
incertaine, et surtout leur mère et leur ami Velutha, l'intouchable. Sur fond de mousson, de
fleuve noir, de plantation de café à l'abandon, d'une faune diverse et souvent
inquiétante, les vies s'écoulent et se ruinent.
Et pourtant ce roman se termine par une fulgurante histoire d'amour.
Le 2 mars 2003
Hélène Dujardin
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